Tout le monde connaissait Akai dans les bas quartiers de Seigokyu, surtout près des docks où elle était connu comme étant la « reine ». On l’appelait ainsi car elle faisait rêver les marins, mais leurs offraient aussi la chance d’être roi le temps de quelques minutes, au moyens de quelques pièces. Elle était belle Akai, n’avait peur de rien, et dirigeait ses affaires d’une main de fer dans un gant de velour. Son métier n’était pas le plus respecté et beaucoup d’autres femmes auraient normalement été en proie au jugements des autres, mais pour elle, c’était différent. L’on respectait Akai pour ce qu’elle était, pour ce qu’elle offrait, mais aussi pour la personne qui se cachait derrière la profession qu’elle exerçait. La rouquine était une femme qui savait écouter ses clients, mais aussi ceux qui avaient simplement besoin d’attention et d’affection. En fait, la rumeur courrait que plus souvent qu’autrement, elle ne couchait même pas avec ceux qui demandaient ses services, car elle savait leur faire le plus grand bien sans avoir à ouvrir les jambes, ni même la bouche. La seule chose qu’elle ouvrait, selon les plus sincère, c’était ses yeux, pour voir la misère, ses oreilles, pour entendre leurs plaintes, et ses bras, pour alléger leurs conscience et accueillir leur souffrances. Enfin, selon les moins sincères et les quelques rares chanceux qui avaient sût être suffisamment intéressant pour la belle, l’on disait qu’elle était « dans une classe à part » et qu’elle « valait bien le montant qu’elle chargeait » car, voyez-vous…Akai n’était pas une sainte malgré tout. Elle aussi, était infectée par l’ivresse de l’or…c’était là son réel défaut.
Cependant, Hitseru lui, ne connaissait rien de cela, ni même n’avait entendu parlé d’elle auparavant. La seule chose qu’il savait d’elle, c’est qu’il l’avait maintenant aperçu à quelques reprises dans son nouvel environnement. Sa tignasse de feu attirait le regard, tout comme sa beauté, mais il n’avait échangé avec qu’elle que quelque regards…certains discrets…d’autres non. Il n’était pas le genre d’homme à masquer ses intentions, mais il aimait jouer le jeu de la séduction. Il savait qu’elle avait remarqué son intérêt, tout comme elle savait qu’il avait remarqué le sien également, mais tous deux jouaient le jeu, se laissaient désirer, en faisant mine de s’ignorer, avant d’échanger un clin d’œil un autre jour, ou un sourire, ou simplement de se mettre en évidence lors du passage de l’autre tout en feignant n’avoir remarqué leurs présences mutuelles. Hitseru, cependant, était un prédateur patient, félin, qui aimait s’amuser avec sa proie. Il la laissait venir à lui…pour mieux la saisir lorsqu’elle se retrouverait dans ses pattes.
Il revenait d’une visite de locaux à louer en fait, mais n’avait rien trouvé qui répondait à ses critères. Sa liste d’achats s’agrandissait de plus en plus, tout comme les besoins qu’il créait à chaque fois qu’une nouvelle idée en attirait une autre dans son esprit un peu trop vif depuis son arrivée au pays de l’eau. Les moyens lui manquait, cependant, et il devait trouver plus de travail, plus de contactes, mais aussi se vider l’esprit, avant d’imploser sous la pression. Et c’est en revenant de sa ronde qu’il la recroisa à nouveau. Elle était là, debout de l’autre côté de la rue, les coudes accotés sur le haut d’une barrière qui passait derrière elle. Son pied était remonté derrière elle, prenait appuie comme ses coudes contre la clôture pendant que l’autre s’ancrait bien au sol. Elle s’était mise à l’aise en regardant les hommes passer, une seule mèche flamboyante qui tombait devant son visage, accentuant cet air espiègle qui régnait en permanence dans ses yeux d’un brun si claire qu’ils paraissaient presque orangés. Elle le regardait lui, avait prise soin de déboutonner le haut de sa chemise, se mordait la lèvre en l’observant des pieds à la tête. Elle faisait exprès avec ses airs aguicheurs et avait décidée que c’était aujourd’hui qu’elle le laisserait jouer avec elle. Le signal ne pouvait être plus clair…mais lui voulait l’entendre. Il voulait qu’elle vienne prendre ce qu’elle désirait. Il voulait qu’elle démontre qu’elle était « la reine » justement et non pas qu’une autre vulgaire princesse qui attendait son prince nonchalamment. Il lui rendit donc un sourire narquois et un clin d’œil, mais continua sa route…ce qui la fit arquer un sourcil. Là…elle ne riait plus. Semblait même l’avoir mal pris cette fois-ci. Assez pour qu’elle se mette à le suivre d’un pas pressé, comme pour le rattraper.
Tournant le coin d’une rue, faisant mine de rien, Hiretsu s’enfonça plus loin dans la basse-ville tout en continuant de longer la zone portuaire, ce qui lui valu à elle d’accentuer le pas encore plus, adoptant une course lente dans le but de ne pas le perdre de vue. Plus elle le pourchassait, plus elle se disait que tour ceci était ridicule, mais au fond d’elle, elle restait amusée, curieuse et avait un profond désir de percer le mystère qui entourait cet homme qu’elle croisait sans cesse depuis plus d’une semaine.
Puis, elle se retrouva face à lui. Il était là, les coudes appuyés sur une barrière devant elle, à trois mètres à peine. Il avait allumé une cigarette et l’observait à travers l’écran presque transparent du voile fumant qu’il soufflait entre eux. Il l’observa, elle, de haut en bas. Ses cheveux, sa tresse, ses épaules, sa poitrines sous sa chemise blanche, sa taille fine, les courbes de ses cuisses, ses longues jambes et les chevilles remontées par les talon de ses bottes en cuire. Un sourcil levé, il tendit sa cigarette à la jeune femme, qui devait avoir à peu près le même âge que lui, puis se mordit la lèvre en plongeant son regard dans le sien. Un frisson lui parcourait l’échine et le bas ventre pendant qu’elle s’avançait et prenait la bâton fumant entre son index et son majeur, frôlant de son pouce le dos de la main de son partenaire de jeu pour la soirée. D’une voix douce et remplie de faux reproches, elle ouvrit la conversation en terminant par un sourire qui en disait long.
-Akai Ce n’est pas bien de faire courir une femme Monsieur…hmm?
L'homme était accroché au regard de la belle, tout comme elle l'était apparemment, tous deux ne se quittant pas des yeux. Prenant un instant avant de lui répondre, laissant flotter un genre d'anticipation dans l'air, le silence du moment était en fait plutôt révélateur de leurs pensées respectives. Leur langage corporel était suffisant pour comprendre qu'il y avait bel et bien une étincelle entre eux, mais peut-être valait-il mieux pour chacun des partis de ne pas se lancer dans ce brasier...au risque de se brûler violemment? Après tout, elle n'était clairement pas sage demoiselle et lui, encore moins enfant de choeur. Brisant le silence du bruit de la semelle de ses bottes, alors qu'il raccourcissait la distance entre eux-deux. Elle prit la cigarette dans sa main, frôlant la sienne au passage, puis la porta à ses lèvres, laissant donc à l'inconnu toute la place dans la conversation. C'était maintenant à lui de répondre aux reproches de la jeune femme.
-Hiretsu Ce n'est pas moi qui a fais le choix de suivre un inconnu en pleine ruelle. À croire que tu espérais que ce soit une invitation.
[I] Provocateur, il rapportait la faute à celle qui avait bel et bien pris la décision de s’aventurer à sa rencontre. Même s’il avait bel et bien espérer qu’elle le suive, il n’avait fait que croiser son regard et échanger un sourire. Dans cette histoire, elle s’était compromise elle-même…mais il serait fou de ne pas avouer que le résultat était celui escompté. La présence de cette femme était plus qu’appréciée et il ne faisait que continuer le jeu qu’ils avaient commencés. De toute façon, elle le savait et ne s’en cachait pas. Ce jeu de rôle innocent auquel ils se prêtaient tous les deux les amusaient, vraisemblablement. Ils y trouvaient tous les deux leur compte, au point même qu’ils ne purent s’empêcher, de concert, d’étouffer un rire à la fois sincère et taquin.
-Hiretsu Allez, plus sérieusement. Que dirais-tu d’aller prendre un verre? Je paie…mais ce sera aussi pour parler…affaire. Tu m’intéresse Akai, et pas seulement pour ta belle silhouette.
Des paroles qui eurent un effet désenchanteur sur toute la situation, ramenant l’ambiance de la romance à celle du mystère et de l’intrigue…mais aussi à un certain degré de danger pour la rouquine qui se sentait soudainement prise au dépourvu, voir presque insécure. Descendant de son nuage, elle semblait à présent apercevoir le danger qui pouvait émaner de l’homme à cravate. Elle aurait dû s’en douter…tous autant qu’ils étaient…s’ils en portaient une, ils faisaient probablement affaire avec le diable d’une manière ou une autre. Elle arqua donc un sourcil, puis adopta une posture plus défensive cette fois-ci, ce qui valu un autre rire du vingtenaire. Décidemment, il était beaucoup plus décontracté qu’elle à présent et cette assurance, cette aise, la déboussolait. Clairement…il n’était pas Mizujin. Il n’agissait pas comme tel…peut-être se trompait-elle à son sujet…après tout, elle ne connaissait pas encore ses motifs et ce qu’il voulait d’elle réellement.
-Hiretsu J’en oublie les bonnes manières. Appelle-moi Hiretsu. Détend-toi, je ne suis pas ivi pour te menacer ou te forcer à quoique ce soit. Je veux d’abord être honnête dans mes intentions et la raison pour laquelle on se parle aujourd’hui. Alors…tu accepte?
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