Quelques jours en Mer, les camarades de bonne humeur, les mouettes qui accompagnaient notre voyage et les musiciens qui faisaient vibrer l’Pont avec leur chant. Evidemment que j’étais avec eux à rire et boire, boire et boire, bouteille à la main que j’claquais sur le tonneau dressé à la verticale qui m’servait de table. Quartier-Maître, j’avais même pris du galon à bord de c’t’équipage de contrebandiers, c’était sympa quand qu’c’était bien animé n’empêche, j’me sentais à ma place et j’donnais quelques croche-pattes quand ça s’bagarrait devant moi hahaha ! Un pas devant l’autre, ou le pas d’après avant celui d’avant… putain j’avais vraiment bien bu, l’gosier était tellement rempli de bon Rhum que j’exprimais mes remerciements à la nature en pissant dans l’eau, par-dessus bord et hisséo matelot accroches toi ça secoue fort !

J’avais arrosé un type qui faisait la causette avec le parquet, comme quoi un peu de produit et une bonne serpillère, le type que j’utilisais pour effacer les traces d’mon passage et hop ! Ni vu, ni connu j’t’embrouille haha ! D’un petit saut que j’faisais remonter mon pantalon, et que j’reficelais ma ceinture de Tissu pour y accrocher mon Sabre avant d’parader, bouteille à la main devant les petits moussaillons.

J’avais un Tricorne, un long manteau écarlate qui d’vait me dire que j’avais au moins un Navire à moi, un équipage ? Non, des forbans d’malheur, que mes couilles s’abattent sur leur joue dans un son qui en ferait pâlir plus d’un, avaient volé mon rafiot, en l’remplaçant par un vrai rafiot : une barque en bois et une jambe d’un cadavre que j’avais déterré pour lui prendre sa rame qui lui servait à marcher jadis, paix à son âme ! Finalement, j’étais embarqué dans c’te drôle d’aventure mais ils filaient le Rhum v’comprenez que si c’est gratuit je prends, j’suis pas compliqué hahaha !

« Aaaah j’arrive pas à rattraper la corde, les voiles !! »

Encore un p’tit matelot qui avait besoin d’un coup d’main. J’lui filais mon Rhum, ptet qu’avec quelques grammes dans le sang, il deviendrait un surhomme ! Quand à moi j’filais droit, un bond périlleux pour rattraper la corde qui pendouillait à dix mètres de haut et j’la rattachais pour finir le travail, finissant à la Vigie.

« Hahaha ! Salut l’Vigie, passes voir ! »

Hop ! La longue vue dans la main j’observais au loin un Navire qui s’rapprochait. Il était vide ? En tout cas il était pas tracté par une flèche c’moi qui vous l’dit ! J’rendis sa paire de jumelles à la Vigie, pas d’donzelle à reluquer avant de redescendre tandis que l’bave perché prévenait l’équipage de la présence du Navire. Il était temps de dépenser toute l’énergie du Rhum accumulée dans l’gosier. J’m’avançais sur le Pont et, en écoutant chanter les joyeux lurons, j’me joignais à eux sans tarder, dégainant mon Sabre.

« Un Navire au loin, du Rhum et d’la barback en plus pour l’diner de ce soir, ça changera d'la bouillie du maître coq, il avait qu'à pondre des oeufs le con, on aurait pu s'faire des omelettes haha ! Paré à l’abordage !!»

Un bout d’corde que j’rattachais à un bout de métal que j’pliais en deux pour lui donner une forme de grappin. Hop ! Lancé à plein élan qu’il s’accrocha sur le Mat du Navire et que j’prenais d’la hauteur, j’me jetais du haut de notre mat, criant l’hymne de l’abordage que chaque Pirate gueulait, bouteille à la main, corde de l’autre en vol plané !

« Pouic Pouic Pouic !! Humba !! »

L’aventure m’appelait, j’lui tendais mon plus beau sourire. Piégé ? Rien à secouer, l’aventure que j’vous dis !!

Contrat:

Le bateau semblait bien neuf, bien lisse, bien r’passé comme il fallait, assez pour dire que les gens qui occupaient l’vaisseau, c’était pas une bande de guss comme nous pour sûr, mais ptet des gens noble ou des êtres humains comme ceux qui n’se servent pas d’ivrognes pour éponger le parquet du Navire haha ! Dans le doute, je commençais par inspecter les voiles qui semblaient utilisées n’y a pas si longtemps que ça, en plus du parquet, j’pouvais voir qu’les moussaillons à bord avaient fait leur travail : pas une trace de poussière. Si y avait un équipage dans c’rafiot, il devait pas être bien loin vu l’état du bordel. Plongé dans mes pensées, je souriais en regardant le Navire approcher.

Le Cap’tain avait l’air grognon, ahlala, les Pirates y en avait deux types v’savez : les aventuriers, casse-cou et toujours partants pour un second tour et du périple et les marins d’eau douce avec un balai dans l’cul et fixé sur des superstitions, mais c’était certain, un larcin avait été commis, ne restait qu’à… mettre la main sur le Rhum en espérant que ces zouaves volants ne carburaient pas à l’eau, nous étions perdus si c’était le cas !

« Ah, v’la le fier flibustier qui chantait à tu tête tantôt que v’la ! » affirmais-je tout en souriant, puis, lorsqu’il posa son avis sur ma tunique, que j’regardais ma tenue et qu’j’voyais rien d’anormal.

« Un coup d’poignard parce qu’j’porte du Rouge ? On n’est pas des taureaux ça d’vrait aller matelot hahaha ! »

Un p’tit coup d’œil et alors qu’y posait sa s’conde question, je f’sais grincer le parquet en bois en y posant mes gros pieds et mes bottes un peu usées par le temps. Un Navire maudit qu’disait les mythes, moi j’disais plutôt qu’y avait un trésor déjà ouvert devant nous, et mon sourire indiquait mon impatience à aller piller c’bordel qu’voilà !

« De c’que j’ai vu plus tôt, l’navire a l’air bien ficelé, bien neuf. Pas d’trace de poussière et sans doute qu’ces gens étaient soignés comme les Olibrius d’nobles qu’on voit parfois ! »

Quelques pas me menèrent jusqu’à l’entrée de la cale, fallait d’jà s’assurer de l’état du rafiot, voir ce qu’on pouvait y trouver, et la cale, c’tait le bon endroit !

« Vu le bordel, qu’c’est pas un bordel vu comment le Vaisseau a l’air neuf, l’équipage devrait pas être bien loin, autant commencer par la cale, on y va l’ami ! »

Ouvrant la voie, j’découpais la planche de bois qui semblait bloquée par un verrou avec mon sabre d’un simple swing, pas l’temps d’jacter ou d’chercher une clé, qu’j’m’aventurais dans c’t’endroit sombre. En y posant l’premier pied, j’constatais qu’aucune fuite était visible, c’qui enlevait la possibilité qu’les écrevisses de rempart aient pris la tangente avant d’être cuites !

J’me tournais vers l’moussaillon et camarade qui portait lui aussi une belle cape, chic !

« Vieux loup d’mer, comme tout bon Marin, si j’devais larguer mon Navire en disparaissant, pas d’doute que j’aurais laissé un journal de bord ! La cale est neuve comme un sou sorti d’la banque, allons voir l’cabine du Capitaine de c’te vaisseau ! » annonçais-je tout sourire, comme un gosse qui d'couvrait un trésor Tonnerre de Brest !

J’cherchais des trésors, des choses qui faisaient briller mes yeux mais des hommes-poissons ? Ils n’avaient pas l’air prêt à partager leur Rhum que j’pouvais voir enfermé dans les tonneaux qui étaient derrière moi. Il était futé l’matelot, et j’le suivais pour pas avoir à être enfermé moi aussi, si j’aimais pas manquer d’boisson, manquer d’air frais c’était comme être laissé à l’abandon sur une île déserte, le pire châtiment pour un Pirate qui voulait s’fendre la poire en découvrant d’nouveaux horizons mais condamné à traîner la jambe en bois dans un trou sans sortie.

« Sortons de là rapidement, j’aime bien l’requin, c’est pas une raison pour inverser l’rôle d’la chaîne alimentaire hahaha ! »

L’excitation de l’inconnu, l’adrénaline du danger montait dans mes veines comme un bon verre de Rhum qui passait son chemin quand j’me rinçais le gosier après une grosse tranche de saucisson artisanal ! J’me sentais bien et même si on s’faisait poursuivre par des hommes-requins bizarres, ils avaient quelque chose de curieux ces bestiaux-là : ils portaient des vêtements ! Est-ce que finalement, ces gens étaient l’équipage, et est-c’que la même chose allait arriver au Maître-Coq ? Haha, à défaut de savoir cuisiner il allait devenir mon steak de ce soir, petit aileron sur une sauce tartare ?

Ca m’plaisait, ne manquait plus que la découpe des sushis ! D’un geste, alors que la trappe en bois explosait sous le coup impactant des poissons humanoïdes, je me repliais un instant prenant un peu de hauteur et voyant l’une des cordes servant à fixer le mat, les voiles comme il le fallait, elle allait être utile !

« S’enfuir alors qu’le plus intéressant nous tend les bras ? On est des Flibustiers messieurs ! Et l’bon Pirate que j’suis va aller explorer la cabine que j’vois là-bas au fond ! »

Alors que les têtes rugissantes, parsemées d’écailles et d’une forme de truite améliorée, j’prenais la corde et d’un bond magistal que j’te passais ces spécimens au vol, atterrissant en équilibre sur la rambarde du Pont supérieur ou s’trouvait la porte. L’ami en cape rouge semblait le suivre, aussitôt que j’lui renvoyais la corde pour qu’il traverse le Pont d’la même manière, il n’avait que quelques secondes mais la curiosité me poussa à ouvrir cette fichue porte. Bordel ! A peine que j’tournais les talons d’mes bottes que deux gredins poissons essayaient d’me bouffer la jambe droite ! Un saut doublé d'un coup de fourreau et un plat des talon d’ma botte dans leurs tronches pour les rendre encore plus plates que celle d’un poiscaille et ils traversaient l’plancher, retour à la cale ! Hahaha !

A l’abordage, l’poiscaille en moins, sabre dans la main j’ouvrais la porte d’un main !

« Allez on s’dépêche, les piranhas arrivent hahaha ! »

Aussitôt les deux flibustiers furent entrés que je r’fermais la pièce, et hop, morceau de ferraille pour la sceller le temps de chercher c’qu’on pouvait comprendre de tout c’foutoir nom d’un albinos mal vissé ! A première vue, la pièce était encore bien rangée, propre, les draps du Lit soyeux, on pouvait y couler la sieste ! Un bureau, et un livre orné d'une belle couverture, c'tait ptet le fameux livre qu'ils cherchaient ?

Nous deux flibustiers avions réussi par un coup d’lasso et d’saut à la corde à atteindre l’autre côté du Pont. Au loin les poiscailles humaines nous gueulaient dessus, sûrement pour qu’on les fasse rôtir à la broche mais ils étaient un peu trop nombreux pour leur enfiler l’épée par le fondement. J’décidais donc de m’concentrer sur la trouvaille du Mekata qui posa ses mains sur un Livre, un carnet de bord ? En tout cas la couverture semblait l’indiquer, ce qui me fit sourire et attisa ma curiosité. Les poissons décidaient de toquer à la porte mais s’arrêtèrent trop vite pour représenter une menace.

Figeant mon sourire, j’reprenais la lecture avec la Cape Rouge, une attaque de Navire il y a quelques jours, mais quelque chose n’collait pas là-dedans, le bateau les avait poursuivi alors que l’équipage entier avait sauté à la Mer. Un bateau qui avait une volonté propre ? Après le bateau-mouche voilà le bateau-poisson ? Hahahaha ! J’retenais pas d’expulser un rire en imaginant tout c’bordel mais que c’était intéressant, ça ravivait l’excitation de l’inconnu qui me faisait vibrer depuis des années.

« Hmm, un bateau qui vogue sans moussaillon, ça c’est cool hahaha ! »

J’jetais rapidement un œil au pavillon dessiné sur ce carnet, penchant ma tête à gauche, puis à droite en recoiffant ma longue moustache. Un squelette rouge…

« Ca m’dit rien, j’en ai croisé du Navire mais c’lui là me rappelle rien, un bateau rempli de poiscailles qui refusent de cuire et s’échappent de la marmitte sur leurs deux guiboles, nom d’un pilon vert moulu que j’m’en souviendrais ! »

Si j’le connaissais pas, après deux bonnes décennies à errer sur les Mers, c’est que peu d’monde l’avait vu, et bien heureux pour ces braves loups d’mer haha !

Si on m’l’avait dit que j’l’aurais pas cru, des mains, des visages qui sortirent du sol pour essayer d’nous attraper et d’nous faire couler comme des briques par le fond. Le calme de quelques seconde avait laissé le temps au fameux Navire de se dévoiler à nous et on était dans une merde noir. Tout souriant, tandis que j’découpais un morceau d’bois qui avait la forme d’une main, j’expliquais rapidement le plan au flibustier qui m’accompagnait.

« Des poissons guerriers, un bateau vivant, ptet que l’bateau mange les trucs qu’il attrape et qu’il a une volonté c’te rafiot haha ! On va sortir de c’te cage mais pas par la porte d’devant, recules toi ! »

Inspirant lentement, ma peau vira écarlate sans que j’comprenne jamais pourquoi, le Rhum ptet ? En tout cas j’avais la pêche et découpant en quatre temps à haute vitesse en direction du mur de gauche, j’perçais le mur qui rendait sur le Pont extérieur.

« Prends l’carnet avec nous, on décolle avant de finir en pâture à tous ces zouaves en bois d’cajou Matelot ! »

Foutre d’fiente de mouette qu’c’était c’bateau de mort Parbleu ! Il s’régénérait tout seul et continuait d’attaquer. Intérieurement j’serrais l’crochet, si j’pouvais pas l’pourfendre ni avec le poing, ni avec mon sabre on était cuits ! L’flibustier à la belle cape m’posa la question pour savoir c’que j’pensais de ce bordel ? J’pensais que c’bateau avait bien b’soin qu’on lui borde l’cordage pour s’calmer haha ! A peine l’Pirate avait eu l’temps d’poser la question qu’le rafiot leur répondait en rebouchant l’trou qu’j’lui avais fait en quelques secondes.

« J’pense qu’y nous a donné la réponse le gredin hahaha ! Un rafiot vivant qui coule pas, doit y avoir d’la vie dans c’bois abîmé faudrait r’garder dans la cale…»

Aussitôt j’tournais le regard que l’matelot s’jeta à la baille, j’le regardais faire et s’élancer par-delà la brume. Casser l’navire ? Hors de question, il était beaucoup trop marrant pour le briser en deux hahaha ! Attrapant la corde dont j’m’étais servi pour arriver à la cabine du Cap’tain, j’m’élançais sur les poissons agglutinés qu’attendaient d’être pêchés ! Un coup d’botte dans la tronche de l’un qu’j’dégainais mon sabre pendant mon vol pour en découper quelques une d’plus !

Hop ! Réception sur la rambarde que j’glissais à Bâbord pour retrouver l’parquet du Pont. Sacrebleu qu’y z’étaient nombreux, c’était la fête mondaine d’poiscaille c’bordel que j’voyais là haha ! Autant l’faire en grandes pompes et avec l’panache ! Du gâchis que j’vous dis mais fallait bien arroser l’maillot ! Paf ! J’éclaboussais la foule avec l’meilleur Rhum d’ma poche avant d’embraser l’air autour du premier moussaillon à écailles ! Grillade en chaînes, barback, sauce tartare et couverts, j’avais même sorti ma serviette d’table pour dîner.

« Pas dégueu c’gueux d’la mer haha ! »

Installé à table devant un tonneau d’rhum qui f’sait office d’support, j’voyais les mains qu’essayaient d’voler mon assiette d’poisson c’gredin de bois ! P’tit swing d’la droite et j’ouvrais le Pont en deux, pile assez pour voir une lueur rouge scintiller comme un rubis ! Oh bordel un trésor nomdidiou !! J’descendais dans la cale en marchant sur la bouffe rôtie avant d’arriver d’vant la lueur s’étrange qu’ça braillait d’vant moi là ! Palsambleu qu’ça brillait mais aussitôt que j’m’approchais, qu’des mains s’levaient, à tel point que j’lâchais l’carnet qu’j’avais pris en passant chez l’Capitaine plus tôt.

Les pattes de bois s’arrêtèrent d’vant moi alors que j’ramassais l’bouquin. Pour être certain, j’touchais l’ouvrage d’la pointe de mon sabre lorsqu’toutes les mains s’retirèrent une par une, z’avaient peur qu’j’fume les pages de c’grimoire de sorcier là ? Hahahaha ! J’prenais mon meilleur sourire et au lieu d’casser le Navire, j’avais décidé d’en faire mon Mathurin !

« L’prochaine fois qu’tu fais des conneries, j’brûle les pages ! J’suis ton nouveau Maître l’rafiot ! Commences par m’préparer le Rhum et files rabattre les voiles matelot !! »

J’remontais victorieux après ma trouvaille et j’avais pris la caravelle en otage, hahaha ! Les mains d’bois m’ramenait le  Rhum et l’sauciflard que j’me mettais bien en attendant l’retour du Flibustier parti en mer, à pieds ! Après quelques minutes j'le voyais d'retour pendant que j'me promenais sur le Pont avec ma choppe remplie de binouze. J'lui faisais signe de la main tout souriant.

« C'un chic matelot l'rafiot là ! Il sait servir l'Rhum et l'sauciflard, j'le prends sous mon aile, parole d'Pirate haha ! »