La forêt du crépuscule.
Un endroit sombre, où les rayons du soleil ne filtrent que très peu.
Au fond, Moe n’est pas surprise qu’il s’y trame de drôles de choses.
L’endroit fournit une gigantesque cachette à quiconque s’y aventure. C’est à la fois une bonne et une mauvaise chose. Pour les animaux, c’est plutôt pratique : ça les préserve de certains prédateurs, tout en leur permettant de mener une vie plutôt confortable. Malheureusement, cette vie confortable dans les ténèbres donne un avantage à l’Homme qui est un désavantage pour le règne animal. Ainsi tapis dans l’ombre, les bêtes sont de véritables proies pour le braconnier, qui n’aura aucun scrupule ni aucun mal à les attraper.

Si la faune peut être un danger pour l’humain, il est évident qu’il représente lui aussi un danger pour elle.
En somme, le chiroptère ne peut être étonnée de voir qu’il existe une espèce menacée dans ces bois.
Les renards blancs.
Ça, ça la surprend un peu, parce qu’elle n’en a jamais vu ni entendu parler.
La rareté de ces créatures les met alors en danger : leur fourrure doit se vendre à prix fort. C’est un produit de luxe, qui pourra, à terme, causer la perte de cette espèce.
Ah, l’Homme.
Machine incapable de se contenir ou de faire dans la parcimonie.

Moe soupire.

Le contrat lui paraît simple comme bonjour, finalement.
Se rendre sur place, enquêter, protéger les renards.

Le souci, c’est qu’elle est elle-même une « espèce » particulière. Une femme qui se transforme en animal, ça ne court pas les rues, encore moins à Tsuchi.
Il va donc falloir qu’elle fasse preuve de beaucoup de prudence pour ne pas être victime de ces chasseurs.
Ça donne un peu de challenge, évidemment, mais ça ne lui fait pas spécialement peur.
Il faudra juste qu’elle réfléchisse posément à un plan d’action.

Mais ça, ça attendra.
D’abord, Moe doit se rendre au village en bordure de la forêt du crépuscule. Là-bas, elle souhaite y rencontrer le commanditaire lui-même, mais aussi obtenir diverses informations au sujet de la chasse.
Il semble qu’il s’agisse d’un vieil homme qui avait un lien particulier avec les renards blancs. Ils avaient continué de prospérer, en se reproduisant et en agrandissant leur famille, au fil des années.
Une histoire adorable, jusqu’à ce que leur fourrure attire le grand public.
Et là, c’est la glissade. Les meurtres, le dépeçage, la mise en danger de l’espèce.
Pas étonnant que l’homme fasse appel à des bras pour mettre un terme à ce braconnage.

Le village en question est un endroit tout à fait charmant. Doté d’une taverne, de petites habitations et juste de quoi permettre à chacun de subsister, il pourrait être complètement oublié, ignoré voire simplement inconnu du grand public.
Moe l’aurait peut-être trouvé, un jour, en voyageant, mais ce serait grâce au hasard, purement et simplement.
Heureusement que l’homme a pris le temps de transmettre son contrat plus loin, avec une carte et de quoi se repérer.

Vêtue d’une cape, les cheveux détachés pour cacher ses oreilles pointues, des vêtements qui couvrent tout le corps, Moe regarde le village.
Elle va devoir s’aventurer dans un des pires endroits créés dans ce monde.
Le lieu où, souvent, la lie de l’univers se retrouve pour cracher son venin, sa bile, sur un monde déjà bien gangrené.
Les tavernes.

Elle commencera par là, ne serait-ce que pour établir un premier contact avec ce village, ses coutumes et ses habitants.
Le vieil homme viendra plus tard.