Ainsi cette mission allait conduire la Tegami jusqu'aux frontières du pays du vent. Du pays des rivières elle ne connaissait pas grand chose si ce n'était l'intelligence avec laquelle sa capitale avait été construite. Ainsi que, par la force des choses, l'historique global du Daïmio de cette nation. Un homme réputé pour sa monotonie. Le reste, Hazure n'avait pas besoin de le savoir. Elle apprenait sur le tas, lorsque ce qui méritait son attention se présentait à elle. La nouvelle Kazekage avait encore à apprendre de ce côté-ci, malgré les nombreuses fois où l'on lui reprocha son manque d'anticipation, à Minami.

Un trait qui tendrait à changer et se bonifier avec le temps et l'exercice de ce nouvel office mais pour le moment... C'était ainsi, tout chez elle n'avait pu être adapté, modelé.

Le village maintenant loin derrière elle, Hazure approchait peu à peu de la moitié de son périple. Entre deux bourrasques, autant de rencontres avec des lézards et en dehors de ceux-ci pas la moindre âme dotée de conscience; elle repensait à cette mission. Cette demande particulière de ne pas dévoiler son identité, se demandant si elle avait bien compris le message, s'il s'agissait d'un genre de psychologie inversée ou d'un ordre. Lui demander... La Daimyo ou même ses proches, devaient se douter que les chances pour qu'elle obéisse aussi bien étaient minces, voire nulles.

Davantage encore lorsque la Tegami estimait que se présenter sous la casquette d'ombre pouvait être plus bénéfique et dissuasif que de garder l'anonymat. Parmi les criminels avertis son prénom avait tendance provoquer des réactions inattendues mais surtout à les dissuader. Bien sûr, il y en avait toujours quelques uns pour tenter leur chance et récupérer une hypothétique prime qui aurait été placée sur sa tête plusieurs années auparavant.

Ce ne fut pas pour autant qu'elle fit crier sur tous les toits qu'elle partait de Suna ou encore quel itinéraire elle emprunterait, lequel elle était la seule à connaître; En même temps, y avait-il vraiment un chemin précis pour traverser un pays comme Kaze ? Des pistes ci et là, des endroits précis où faire halte sur le trajet aussi; mais rien de bien défini, au final. Le plus important restait d'être capable de s'orienter au milieu d'un océan de sable et ses vagues silicieuses.

Pour tout dire, Hazure trouva son voyage jusque Kawa, que ce fut la première ou la seconde partie, d'un ennui mortel bien que ponctué de quelques pauses salutaires. Pas un bandit à l'horizon, pas un marchand ni un voyageur non plus. Peut-être était-ce là le fait de l'itinéraire qu'elle avait choisi. Ce fut donc sans grande encombre qu'elle parvint à cette auberge à la frontière du pays des rivières non loin du point de rendez-vous qui avait été établi.

Elle ne savait rien de ce "fils de" qu'elle devait escorter, tout ce qu'elle espérait... Qu'il ne soit pas comme ces aristocrates de la capitale, qu'il ne soit pas guindé ou trop... "enfant". Mais elle le savait, les enfants de notables et autres seigneurs étaient souvent trop protégés et vivaient trop rarement dans le monde réel.

La nuit passée, le jour où commençait réellement ce pourquoi Suna était rémunéré débutait.  A quelques lieux d'ici se trouvaient le village où elle devait "récupérer la marchandise", un lieu dit davantage qu'un village; elle n'y était passée durant toute sa vie qu'une ou deux fois, suffisantes à ce qu'elle s'oriente. Malgré le peu de temps qu'elle passerait dans ce pays, elle se souvint rapidement de ce qui la ramenait à chaque fois à Kaze.

L'humidité, l'impression qu'il faisait partout ailleurs plus froid qu'à Kaze, le manque de soleil... Que de bonnes raisons pour une personne telle qu'elle d'y préférer son pays natal; comme n'importe qui, sûrement. Rien ne lui semblait avoir changé depuis son dernier passage, en dehors d'une poignée d'arbres en plus. Le chemin qu'elle empruntait était le même, entretenu bien que toujours aussi "naturel". Pas de pavés ni d'autres revêtements l’agrémentant, heureusement pour elle, il n'avait pas plu.

En revanche elle remarque en approchant de sa destination, qu'ici, cela avait bien évolué. D'abord formé d'une ou deux bâtisses, dans ses souvenirs, arborant pauvrement le bord de la route; le lieu-dit s'était agrémenté ressemblant maintenant bien plus à un petit quartier comme ceux qu'on pouvait trouver à Suna. Sans doute les échanges et le commerce entre la rivière et le vent avaient-ils étaient, plus que bénéfiques; prolifiques.

Il y avait même maintenant une petite place entre les maisonnettes. Elle smblait récente, les pierres qui la constituaient ne semblaient pas avoir souffert du temps et de ses caprices, bien taillées, bien ordonnées, propres... Elle l'avait donc rejoint, observant les habitants de ce petit hameau s'éveiller et sortir de leurs domiciles, certains surpris de voir qu'une étrangère tatouée attendait de si bonne heure. De sa naturelle spontanéité, Hazure en avait salué de la main, accompagné d'un sourire se voulant sympathique.

L'ombre de Suna ne cherchait pas éviter d'éveiller les soupçons puisqu'il n'y avait rien à soupçonner, elle voulait seulement que sa présence ici, bien qu'on la reconnut pas au premier, ne provoque aucun événement infortuné ou une quelconque altercation. Que ce fut à des "bandits" ou les autorités du pays; Hazure ne voulait avoir affaire ni aux uns ni aux autres. Pas par crainte. Par soucis d'économie, celle de son temps.

Ainsi, elle attendit, gardant son naturel, s'appuyant contre un muret et se redressant de temps à autre, jusqu'à ce qu'enfin la raison de sa présence ici se manifeste. Cinq hommes à cheval s'étaient engagés sur le chemin qui se trouvait être aussi la principale rue de ce village en devenir. Portant des tenues typiques, plaques armoriées sur le torse, casques, et épées à la ceinture; elle reconnut en eux des soldats, ou des gardes. Quant au cinquième, vêtu de somptueux habits, il devait être...

-Vous êtes de Suna ? Avait-il lancé à la Tegami avec ce ton qui laissait s'éventer toute sa supériorité.
-Je suis de Suna. Vous êtes le gosse de riche ? Rétorqua Hazure.
-Kunoichi ! Comment osez vous vous adresser de la sorte... Avait commencé l'un des gardes.
-Hahaha... Ce n'est rien. Avait rigolé le jeune homme. Je me disais justement que votre tête me rappelait quelqu'un, mais maintenant c'est certain ! Je suis entre de bonnes mains. Mais, mes hommes vont nous accompagner, pour plus de sécurité. Sourit-il.
-Tes hommes vont rester là et tu vas descendre de ton grand cheval. A moins qu'ils soient des ninjas ? Et les chevaux dans le désert, c’est pas la meilleure idée surtout s’ils ont pas l’habitude.

Un court silence et le jeune homme qu’Hazure devait escorter descendit de sa monture en acquiesçant de la tête. Il avait changé de ton. La nouvelle ombre en fut d’ailleurs surprise, elle s’attendait à davantage de blabla, plus de condescendance. Il adressa même quelques mots à ses hommes, leur demandant –ou ordonnant- de rester ici.

-C’est pas contre vous les gars, mais vous allez nous ralentir et je peux pas m’amuser à protéger cinq personnes à la fois en cas de problème. Avait-elle dit en les observant, un peu goguenarde.

Les gardes ne relevèrent pas, restèrent impassibles. Si leur maître ne contestait pas… alors eux avaient encore moins à redire. L’instant suivant, Hazure demanda à son colis s’il était prêt pour le voyage, puis après confirmation, elle donna le départ. D’un pas décontracté, elle s’éloigna, le paquet à ses côtés ; laissant derrière eux les gardes qui continuaient de la, ou les fixer. Ils marchèrent un moment, jusqu’à ce que la place et ses occupants ne soient plus visibles. Ainsi, loin des oreilles indiscrètes ; elle lui demanda :

-Alors, comme ça tu sais qui je suis ? L’interrogeait-elle, intéressée d’entendre ce qu’il avait à dire.

-Savoir qui vous êtes, entièrement, je ne peux dire. Mais je sais que vous dirigez Suna, ainsi je suis honoré que vous m'escortiez. Avait-il répondu d'un ton plus détendu, un peu moins hautain. Aussi que votre passé est trouble, mais ce qui compte... C'est ce que vous faites aujourd'hui non ?

Hazure ne répondit pas sur l'instant. Elle marchait, le pas tranquille, se disant qu'ils étaient encore assez loin de la frontière et qu'à cette vitesse ils ne l'atteindraient pas avant la tombée de la nuit. Elle soupira, prit le temps de répondre.

-C'est ça, c'est moi. Evite de le dire à tout le monde, comme tu devras éviter de dire qui t'es à n'importe qui. Avait-elle répondu avec une certaine indifférence bien qu'elle ne l'était pas tout à fait. S'il venait à rompre cette règle, cela l'obligerait à agir et elle n'avait pas envie de trop se fatiguer. Ton père a des ennemis ? Si on m'envoie au lieu d'une équipe complète, c'est qu'il y a un truc qu'il redoute autant que ses amis de Kaze. Je dois m'attendre à quoi ?

Il y eut de nouveau un silence, le fils du fameux dignitaire semblait réfléchir à la meilleure réponse qu'il pourrait lui fournir. Rapidement Hazure se dit qu'il devait être en train de chercher et plus le temps passait plus elle se disait qu'effectivement il devait y avoir une menace.

-C'est pertinent. Mais je ne saurais vous répondre. Père a bien des ennemis... Mais à Suna ? De toute façon personne ne sait que je voyage jusqu'à Minami. Ni mes gardes, ni mes frères.. Juste Père, et nos amis de Minami. Il avait haussé les épaules, la Tegami le fixa; il semblait honnête.

Hazure prêtait sa confiance aussi facilement qu'elle pouvait la reprendre. L'expérience qu'elle avait acquis à Junapura l'avait rendu assez confiante et "régler" une trahison ne lui avait jamais fait peur. Faire disparaître ce jeune homme, pas davantage. Ainsi ils marchèrent un assez long moment jusqu'à la prochaine étape, un autre petit village frontalier.

Fort heureusement, son colis n'avait pas engagé la conversation, tout comme elle. Pour son plus grand plaisir. Les longues discussions avec des inconnus n'étaient pas vraiment sa plus grande passion.

Elle n'allait pas rependre exactement le même chemin pour retourner à Suna... Ce serait idiot. Cela lui rappelait ses amusantes escapades nocturnes, lorsqu'elle devait semer les autorités des villes ou villages qu'elle visitait.

Le répit offert par ces longues heures sans un mot prit fin, malheureusement. Au début, Hazure n'avait pas répondu à sa question si "quelconque". Puis, en vint une autre...

-Hum... Vous êtes une Kunoichi, donc vous pouvez utiliser des... hum... Ninjutsu ? Je n'en ai jamais vu, vous pourriez me faire une démonstration ?
-Pardon ? Non. J'vais pas gâcher mon énergie pour vous faire un spectacle.
-Allé, même un tout petit ?
-Je t'ai dit non.
-Vous n'aimez pas vous amuser vous, hein ? Alors... vous jeter un kunai ou shuriken avec cette dextérité légendaire ?
-De quoi...? Non, je ne vais pas non plus lancer... J'suis pas une bête foire... Répondit-elle dans un roulement d'yeux. Tu t'y connais vachement en truc de shinobi, pour un p'tit riche pourri gâté.
-Alors, d'une part je ne suis pas un petit riche pourri gâté. Enfin, je suis riche, oui. Mais pas pourri gâté. Et d'autre part, oui je trouve ces aptitudes fascinantes. Il se tut un instant en fixant la Kazekage d'un air intrigué. -Même pas une petite aiguille ?
-Hmpf... Non.
-Vous avez peur d'échouer ? Ou alors vous êtes trop mauvaise en fait...

Elle s'arrêta tout à coup de marcher et le regarda, les sourcils haussés. Elle avait compris qu'il la provoquait pour obtenir ce qu'il voulait.

-Si je te montre un truc, tu arrêtes de me saouler ? Demanda-t-elle un peu lassée. Le jeune homme mima une clé qui verrouillait l'orifice qui lui servait de bouche. Bon... Elle exécuta plus signes et devant eux, sur la route de terre sèche, apparut de nulle part un mur de pierre. Elle avança et passa au travers, disparaissant derrière. Puis lorsqu'il disparut... C'est bon, ça te va là ? On peut reprendre la route ?
-Génial ! Vraiment génial ! Oui, allons-y ! Fit-il en la rejoignant, visiblement content. J'aurais tellement aimé être un shinobi...
-Haha... Fit-elle pleine de sarcasme. Non j'crois pas non. Sauf si t'es prêt à te faire tuer. Te faire prendre pour cible etcetera. Continuait-elle sur un ton ironique. Moi, j'aurais préféré naître dans une famille comme la tienne. Mais on choisit pas sa naissance et pas vraiment ce qu'on devient non plus.
-De sages paroles... Mais vous savez, pour la famille, il y a toujours possibilité de s'arranger... Dit-il sur un ton détonnant, avec un clin d'œil.
-Heu... Tu me dragues là ? Tu t'y prends mal.
-Ô il y a donc une façon de s'y prendre avec vous... Mais non, je ne me permettrai pas, Kazekage-sama.
-... Tu devais te taire en échange de la démonstration. Alors tais-toi. Et tu ne m'appelles plus comme ça, ni par mon nom. C'est compris ? Dit-elle en attrapant fermement son bras et le faisant passer devant elle. Marche devant, j'verrai mieux si quelqu'un vient nous chercher des noises.