Cela faisait une petite semaine que Keiko était rentrée de sa dernière mission. Cette dernière l'avait mené le long de la côte est, du côté de Port-Tonnerre. Cette mission s'était tenue après une autre du côté d'Onegai. La sensorielle commençait a bien connaitre l'arrière-pays de Kaminari ! Après avoir passé plus de dix ans en poste au même endroit le long de la frontière de Shimo, c'était assurément un pas de plus vers un de ses rêves les plus inavoués qui était de parcourir le monde. Pour cela il lui fallait plus de libertés et donc une promotion au rang de Chûnin. La militaire enchainait les missions ces derniers temps et espérait qu'on lui confie ce genre de responsabilités. Le plus tôt serait le mieux. Elle en avait surtout assez des querelles de voisinages et des missions de bas rang qu'on confiait aux Genins. Même s'il fallait avouer que les autorités lui avait confié des missions plus intéressantes ces derniers temps. A part peut être celle à la bibliothèque.

Ironiquement, elle était en ce jour associée à la même kumojin en la personne de Senbaru Muku.

Comme à son habitude, Keiko était très matinale et attendit sa partenaire aux Portes des Cieux. Le trajet serait long et elle espérait secrètement travailler sur sa communication. Il faudrait une bonne journée pour se rendre à Houjoun. Si l'ambiance était délétère, elle risquait de trouver le temps long. La sensorielle se promit de ne pas tenter de faire de traits d'humour ou se montrer déplacée de quelque manière que ce soit. Elle parlerait météo. Les gens aimaient bien parler du temps, non ? Elle avait lu ça dans un livre. Et puis Keiko n'avait jamais mit les pieds à Houjoun, un petit village d'agriculteurs sur la côte ouest, juste au nord de la capitale. Elle aurait ainsi tout le loisir d'observer les paysages et de découvrir de nouvelles choses sur le trajet.

Keiko avait effectué sa dernière mission ne compagnie d'une jeune femme au tempérament très rigide et militaire. Une spécialiste en Taijutsu qui lui ressemblait sur pas mal d'aspects. Les deux kumojines avaient d'ailleurs formé un super duo à cette occasion. Un duo très complémentaire et elle espérait qu'il en soit de même avec Muku. Ses propres capacités sensorielles s'accordaient généralement très bien avec tous ses pairs, du plus bourrin ou plus réfléchi, du spécialiste du Taijutsu aux spécialistes en Ninjutsu ou encore en Genjutsu. Comme elle a pu le constater à de nombreuses reprises. Hiroki disait d'ailleurs que c'était dû à la rareté de ses compétences dites de soutien qui lui permettaient énormément de liberté et de nombreuses applications sur le terrain.

"Bonjour Muku, tu es prête ? Tu es déjà allé à Houjoun ?"

Le visage de Keiko s'anima alors qu'elle se redressa et quitta le réconfort froid du mur d'enceinte sur lequel elle était adossée. Elle entama éventuellement la conversation en se mettant en marche. La route était très longue après tout.

@Senbaru Muku

Mission:

Keiko était généralement accommodante mais lorsque Muku évoqua un détour, la militaire de carrière manqua de s'étouffer. La réussite d'une mission était tout ce qui comptait à ses yeux et plus vite le duo serait sur place, plus vite les problèmes seraient régler et plus vite elles seraient de retour à Kumo afin de se voir confier une autre tâche. Elle pensa un moment à refuser avant de se rappeler qu'elle voulait aussi bosser sa communication et son relationnel avec ses pairs. Si sa jeune partenaire voulait voir la mer alors que des civils crevaient de faim, soit. Ironiquement la sensorielle n'était pas d'une nature très empathique. Spécialement envers ces fameux habitants de Kaminari qui se posaient constamment en victimes et qui, sauf exceptions, refusaient d'y faire quoique ce soit et de changer leur destinée. C'est pas en venant tout le temps à leur secours que ces civils prendraient conscience qu'il fallait qu'ils y mettent du leur...

"La mer ? Si tu veux. Y'a une raison particulière à ce détour ?"

Keiko demanda tout de même, plus curieuse qu'autre chose. Elle aimait en apprendre davantage sur ses partenaires sur le trajet des missions les plus longues. Même si d'ordinaire cela tourne autour de leurs capacités respectives. Tout ce qui pouvait l'aider, non seulement à cerner ses pairs mais aussi à anticiper leurs réactions à divers évènements qui pourraient se produire durant les missions. Certains anciens partenaires lui vinrent immédiatement en tête comme Kaori, Hanae, Fubuhi et Nanabe qui étaient plus dans l'action ou Momiji, Juro ou encore Sayuri qui semblaient plus mesurés et dans la réflexion. La sensorielle se demandait d'ailleurs dans quelle catégorie se trouvait Muku, même si leur dernière mission à la bibliothèque et son penchant pour la cartographie et plus généralement les livres faisaient pencher la balance dans la deuxième catégorie. Elle voulut en avoir le cœur net avant d'arriver à Houjoun.

"Tu as des capacités particulières ? Personnellement je suis une sensorielle experte et je maitrise les bases du Bukijutsu au corps-à-corps."

Keiko demanda avec sa franchise habituelle, désignant la lame qui courait horizontalement dans son dos au niveau de sa taille. Muku pouvait distinguer une petite lame s'apparentant à un wakizashi. Une arme plus faite pour l'assassinat et les attaques rapides que les combats en bonne et due forme.

La ville de Houjun est pleine de troubles, d’abord ces problèmes en lien avec un seigneur local, puis maintenant, des histoires d’agriculture. Drapée dans mon antique cape en paille de riz qui a vue de meilleurs jours, j’attends que les renforts arrivent. Selon le messager qui m’a porté la mission, c’est Muku et Keiko qui doivent s’en charger. Etant déjà sur place, on m’a gentiment (mais fermement) sommée de les aider du mieux que je pouvais. Selon le porteur de la missive, comme toujours, il faut protéger les champs d’un agriculteur et comprendre pourquoi on essaie de faire pression sur lui.
De mon opinion personnelle, le jinsei doit essayer de contrôler les ressources alimentaires de Kaminari. L’essence même de la guerre est d’exercer une pression constante sur la faction adverse, en forçant les gens à venir à lui, le jinsei s’octroie une légitimité qui pourrait faire cruellement défaut à la Raikage et au Daimyo. Lorsque les estomacs sont vides, les idéaux sont relégués au second-plan, si le plan du jinsei est bien ficelé, je le trouve méchant. Affamer les populations pour forcer un soulèvement contre le Daimyo n’est pas honorable, encore une fois, ce sont les petites gens qui vont payer pour les frasques de quelques donneurs d’ordres. C’est bien pour cela que, si j’avais une quelconque sympathie envers la principale force d’opposition au pouvoir en place, je n’ai plus de scrupules à lutter contre eux aujourd’hui.

« Et donc, » reprend Yagura, un petit fermier aux yeux roses, que je verrais bien comme Mizukage, pour une raison qui m’échappe totalement. « J’ai refusé plusieurs fois leurs offres, ils voulaient me racheter mes terres, mais j’ai dit non. Ensuite, mon champ d’orge est mort d’un seul coup, en une nuit tous les plans étaient pourris. J’ai fait appel aux ninjas de Kumo, mais quand vous êtes arrivée… » Yagura a un pincement de lèvre et il pointe du doigt les inscriptions sur sa maison.

« Traître. », écrit en lettres de sang sur la façade de sa demeure. Le paysan était en train de nettoyer quand je suis venue lui rendre visite. Il secoue la tête, incrédule et amer : il travaille la terre toute la sainte journée pour qu’on lui sabote les fruits de son labeur. Le propriétaire terrien secoue la tête avant de reprendre.

« C’est un gros homme chauve et rasé de près qui est venu m’aborder, il est accompagné d’un autre, un grand type barbu avec des cheveux longs. Le deuxième est probablement un ancien ronin, ou un ninja : il avait un katana à la ceinture. Ils doivent chercher à investir dans les campagnes. J’ignore pour quelle raison, mais mes terres les intéressent très fortement.
-Vous n’êtes pas investi dans la politique de la ville ?
-Un peu, régulièrement quand des ninjas de Kumo sont de passage, je leur offre le gite et le couvert. Ça leur évite à payer une auberge. » Pas étonnant que trois ninjas aient été assigné sur cette mission.
On protège ses partisans et on en prend soin.
J’ai un sourire et lui offre une courbette.

« Bien sûr, je vous en suis humblement reconnaissante. » Je détecte une présence familière. « D’ailleurs, je crois que mes collègues arrivent. »

Mishima Keiko et Senbaru Muku, les meilleures genins de Kumo ! Je leur fais signe.

« Keiko, Mumu ! Vous avez fait bon voyage ? »

Muku ne compatit pas à la peine du paysan et je pose une main sur l’épaule de Yagura : nous trouverons les instigateurs de ces sabotages. Ils seront traduits en justice et il sera indemnisé pour ses pertes, d’une manière ou d’une autre. J’essaie d’assimiler toutes les informations qui se présentent à moi : les plants à l’extérieurs ont été grillés, au contraire, ceux plus profondément dans le champ ont pourri et sont à moitié dévorés, enfin, les plantes centrales sont sans racines. J’ai du mal à comprendre qui pourrait faire cela, Yagura suppose une nuée d’insectes, mais là encore, tout aurait dû être dévoré, je ne connais aucun insecte qui serait aussi sélectif sur son repas du jour. Un incendie aurait ravagé les terres, un champignon peut-être ? Une sorte de parasite qui aurait attaqué ses cultures comme les patates peuvent avoir le mildiou ? C’est une explication qui me semble étrange, néanmoins, c’est une explication viable, quelque chose qui me fait cruellement défaut en inspectant les cultures.
Le fermier attend de nous une réponse, nous sommes des ninjas de Kumo, nous sommes censés savoir. J’ai un regard vers Yagura, puis Muku. Finalement, je prends la parole après avoir réfléchi.

« Peut-être un parasite, ou un poison. Le temps est assez sec, j’imagine bien quelqu’un verser du poison dans le canal, rien de très puissant, simplement une petite dose pour faire pourrir les plantations. » Je n’ignore pas que Muku a bu dedans. « Assez pour tuer des plantes déjà affaibli par le temps et les insectes, pas assez pour empoisonner le bétail et les humains. » L’agriculture n’a jamais été mon fort, le seigle est une plante comme une autre pour moi, elles se ressemblent toutes. « L’ergot de seigle peut-être ? Un type aurait répandu l’ergot de seigle dans le champ ? » Je me retourne vers le fermier. « Vous avez vu quelque chose cette nuit ? Entendu des bruits bizarre, constater une activité étrange autour de vos champs ? Si une nuée d’insecte avait ravagé vos champs, l’auriez-vous entendu ? »

J’arrache un plant mort : les racines ont été dévorées et il est tout fripé, il a triste mine.

« Nous pourrions tendre une embuscade aux types qui veulent votre champ. On se cache dans le champ et lorsqu’ils arrivent pour vous demander d’acheter, on les arrête et on leur demande des explications. Muku, qu’en penses-tu ? »

HRP:

C’est avec une vigueur exceptionnelle que Yuri se mit en direction de Houjun. Elle eut tout juste le temps de prévenir Itoe de son départ imprévu afin qu’elle ne s’inquiète pas de sa disparition. Elle comprendra sûrement. En raison de l’ingénieuse composition du poison, Yuri n’avait eu le temps de fabriquer un antidote que pour arrêter son expansion. Les dommages que celui-ci aurait déjà causés n’étaient pas suppressibles par des moyens conventionnels mais Yuri n’était pas venue sans solution. La jeune femme accéléra le pas en voyant la ferme de l’agriculteur dont venait la requête de mission dont Yuri avait préalablement demandé une copie au bureau. Maintenant qu’elle s’était déplacée, la jeune femme voulait bien épauler sa camarade lorsqu’elle sera tirée d’affaire.

Malheureusement, au vu de la gravité de la situation, Yuri n’avait clairement pas eu le temps d’établir de s’occuper de la problématique du champ de l’agriculteur. Il y avait potentiellement une vie humaine en jeu. Cependant, pour limiter les problèmes, Yuri avait laissé ses directives au sein du Kagakusha pour un traitement primaire du ruisseau contaminé. Ainsi, alors que la jeune brune était déjà à Houjun, elle avait laissé tourner de larges cuves de sels d’aluminium. Ces derniers étaient utiles dans le traitement primaire des eaux et servaient notamment à forcer la précipitation des particules en suspension. De cette manière, Yuri espérait minimiser l’impact sur de  futurs empoisonnements.

C’est avec une grande précipitation que la jeune femme tambourina la porte de la maison de l’agriculteur, peut-être un peu trop fort…Quelques secondes plus tard, la porte s’ouvrit. Au lieu de voir le visage familier du paysan, Yuri tomba nez à nez avec la pointe de sa fourche. Initiant un mouvement de recul, la jeune brune était prête à activer sa lame de chakra quand elle entendit son prénom.

« Yuri ?! Je ne t’attendais pas à cette heure-ci. Je croyais que c’était encore ces malfrats qui étaient revenus pour me prendre ce qui me restait ! »

La jeune brune se calma un instant, s’excusant de sa brusque réaction. L’inquiétude se lisait sur son visage et la jeune femme ne tarda pas à demander des nouvelles de sa collègue. Dans d’autres circonstances, Yuri aurait certainement beaucoup aimé discuter avec le vieil agriculteur après autant d’années. Elle n’avait jamais oublié son hospitalité et se souvenait que ce dernier entretenait des réactions relativement cordiales avec les ninjas qui passaient par Houjun, ce qui lui valait parfois des représailles de la part de ses voisins, estimant que c’était un vendu des autorités. Remettant ces pensées à plus tard, Yuri rejoignit l’homme dans sa demeure.

« Alors ? Comment va-t-elle ? »

Le visage de l’homme ne laissait pas transparaitre d’émotion. Si bien que Yuri ne connaissait pas l’état de santé de sa camarade à l’heure actuelle. Pour autant, la jeune scientifique ne pouvait pas se permettre de retourner la maison du pauvre agriculteur alors elle attendit patiemment sa réponse qui vint au bout de quelques secondes :

« Je pense que tu es beaucoup mieux qualifiée que moi pour jauger la situation alors il vaut mieux que tu constates par toi-même. On parlera des détails de la missive que j’ai envoyée quand tu auras vu ton amie. »

Yagura la conduisit donc à la chambre dans laquelle on avait disposé Muku. La pièce renfermait une odeur forte de transpiration qui donnait une première indication sur l’état de santé de sa camarade. Son corps était immobile et des gouttes perlaient sur son front. Son corps semblait être engagé dans une lutte interminable contre la souffrance. Malgré les quelques ressentis qu’elle nourrissait envers Muku, la voir dans cet état lui faisait de la peine. Elle avait bien fait de venir en personne. Il ne fallait pas que d’autres personnes puissent la voir ainsi.

« Quand est-ce qu’elle a commencé à présenter ce genre de symptômes ? »

« Je ne saurais pas vraiment vous dire. Au diner, elle m’avait paru un peu pâle mais je n’ai pas vraiment insisté. Plus tard dans la nuit, on a été réveillés par les animaux. La petite était tombée de l’échelle et s’était évanouie. Je ne pense pas qu’elle se soit blessée mais depuis cet instant, elle a l’air de souffrir terriblement. »

Yuri s’approcha du chevet de la jeune femme. Elle lui écarta une mèche de cheveux et posa l’arrière de sa main sur son front. Muku était brûlante. La jeune femme se tourna vers l’agriculteur en lui donnant des instructions. Quelques minutes plus tard, l’homme revint avec une bassine d’eau et une serviette, le visage aussi inquiet que celui de la scientifique.

« Elle va s’en sortir ? »

Yuri lui prit la bassine des mains et la déposa au pied du lit.

« Je pense pouvoir la guérir mais il me faut du calme donc dis à ta famille de ne pas entrer ici. Cela risque de prendre du temps. »

Le paysan hocha la tête avant de sortir, refermant soigneusement la porte sur le couple de femmes. Yuri utilisa sa technique d’analyse afin d’obtenir rapidement un diagnostic. En réalité, la jeune femme savait à quoi s’attendre et sa technique ne fit que confirmer ses peurs. Muku avait fait son possible pour tenir bon jusqu’à son arrivée et Yuri espérait que ces conseils, même minimes avaient pu retarder un peu la propagation. La jeune femme commença donc par déballer ses affaires. En premier lieu, il fallait arrêter le mal qui rongeait son corps peu à peu en administrant l’antidote qu’elle avait confectionné.

« Au moins, le poison n’a pas atteint les cellules du myocarde… » Se rassura-t-elle.

Sans entrer dans les détails, il était principalement composé d’un principe actif trouver dans certains types de plantes apparentées aux belladones. Celui-ci permettait notamment d’entrer en compétition avec le poison au niveau des récepteurs et de le chasser hors de celles-ci. Par la suite, les résidus étaient éliminés par digestion cellulaire. Yuri s’affaira donc à se saisir du bras de sa camarade, remontant sa manche jusqu’au coude. Une fois celui-ci dégagé, la jeune femme le palpa à la recherche d’une veine et y planta une aiguille à laquelle elle relia une sorte de sachet contenant de l’eau ainsi que des médicaments permettant de faire baisser la température. La fiole d’antidote était quant à elle disposée de manière à ce qu’une goutte soit délivrée à la fois, à la manière dont le ferait un percolateur. Le but de la manœuvre était de délivrer l’antidote petit à petit afin de ménager le corps affaibli de sa camarade.

Peu importe la durée que Muku passerait dans l’inconscience, Yuri resterait à veiller sur elle à son chevet. De temps à autre, elle changeait l’aiguille plantée dans son bras, essuyait son visage à l’aide de la serviette et surveillait attentivement son état de santé. Ceci ne constituait que la première étape de son traitement car même si le poison avait arrêté sa propagation, il n’en restait pas moins ancré dans ses organes. En l’occurrence, son foie, bien que toujours fonctionnel, avait été sollicité fortement pour essayer de stocker le poison. Il fallait donc agir manuellement pour l’extraire mais Yuri ne pouvait se risquer à le faire sur un corps aussi affaibli. Elle attendit donc patiemment que Muku ne sorte de son inconscience avant de lui exposer la suite.

Techniques utilisées:

« Evidemment, je n’allais tout de même pas t’abandonner à ton triste sort. Je suis désolée pour le retard, j’ai fait aussi vite que j’ai pu. »

Muku se montra coopérative. D’un côté, Yuri était soulagée d’être arrivée à temps. Aussi, Muku paraissait beaucoup moins fausse qu’à son habitude. Son corps ne lui en donnait simplement pas les moyens. La voir aussi vulnérable permettait à la jeune femme de la comprendre un peu mieux. Son sommeil était agité et sa réaction au réveil fut brusque. Sans doute avait-elle vécu des choses atroces dans le passé que le poison ne rendait que plus horribles. Toutefois, la jeune genin se ressaisit rapidement et semblait comprendre ce que la Miyaawa essayait de lui expliquer. Au même moment, un bruit extérieur vint perturber leur conversation et un simple coup d’œil à l’extérieur permettait de comprendre la situation. Yuri attendit que la conversation ne se finisse avant de sortir de la chambre et de rencontrer le fermier. Assis sur son canapé, le visage dans les mains, il daigna lever la tête lorsque Yuri vint aux nouvelles.

« Alors ? »


« Elle n’est pas encore tout à fait tirée d’affaire mais j’ai de bons espoirs concernant sa guérison. En réalité, cette petite visite nocturne m’a perturbé dans mon travail. »

« Je suis désolé mais ce sont encore ces types qui reviennent à la charge. Ca y est, toutes mes parcelles ont été détruites. Il ne me reste quasiment plus rien de la moisson de la saison dernière. Ils sont venus me dire qu’ils recommenceraient autant de fois qu’il le fallait jusqu’à ce que je leur cède mes terres… »

Yuri était perplexe. Son cerveau était surchargé par trop d’urgences à la fois. D’un côté, elle devait soigner Muku, appréhender les deux personnes et résoudre le problème des récoltes. Non, même pour un esprit aussi ingénieux que le sien, elle ne pouvait pas être partout à la fois.

« Un problème à la fois, Yuri…ressaisis-toi ou c’est toi qui tombera malade aussi ! »

La jeune brune rassura l’homme en posant une main sur son épaule.

« Je te promets de chasser ces malfrats de terre. Tu auras suffisamment à manger avant le prochain hiver, je te le promets. Mais actuellement, il faut que je soigne ma compagne. Elle aussi est un atout précieux de mon village, je ne peux pas la laisser tomber. »

Un sourire rassurant illuminait son visage. Cela faisait bien des années que le vieil agriculteur ne l’avait plus vue mais même à l’époque, il avait toujours pensé que cette petite avait de la suite dans les idées mais surtout un grand cœur. Qu’elle soit devenue une kunoichi de Kumo ne l’étonnait pas et au fond, il nourrissait l’espoir que Yuri puisse régler son problème. Sur cette réflexion, il la laissa rejoindre la chambre en espérant qu’ils ne seraient pas davantage dérangés ce soir. Muku semblait fatiguée mais au moins, elle était consciente. La suite des évènements risquait d’être très délicat et légèrement gênant aussi mais c’était la seule solution pour que la Senbaru puisse rapidement recouvrer sa santé. De bonne foi, Yuri raconta son bref échange avec le fermier pendant qu’elle retirait les couvertures du lit.

« Tu avais raison, des gens ont commandité des ninjas pour réquisitionner ces terres. Les personnes ont l’air d’être très professionnelles et savent exactement ce qu’ils font. Je n’ai pas encore analysé le champ mais je m’y attèlerais dès que tu seras tirée d’affaire. Je te préviens mais je vais devoir puiser sérieusement dans mes réserves de chakra. Cela m’épuisera sans doute pour les prochaines vingt-quatre heures alors je compte sur toi pour continuer les recherches. Il ne faut absolument pas laisser l’ennemi exploiter nos moments de faiblesse. »


Muku semblait avoir donné le feu vert à la scientifique pour pratiquer l’extraction de poison. Ainsi, elle prépara une bassine à demi-remplie d’eau dans laquelle elle verserait le contenu de ce qu’elle extrairait du corps de sa collègue. C’était une étape qui pouvait être douloureuse mais cela dépendait aussi du manipulateur et de la sensibilité à la douleur du patient. Chaque personne était différente mais Yuri s’appliquerait pour que cela soit le moins désagréable possible. Elle pratiquait beaucoup pendant son temps libre en prévision de telles situations alors la jeune brune n’avait pas peur de se lancer. Par souci d’honnêteté, Yuri exposa tout de même à Muku ce qu’il allait lui arriver.

« Le poison s’est installé durablement dans tes organes. Il détruit tes cellules et empêche la régénération naturelle. En fait, si j’avais eu plus de temps, j’aurais pu élaborer un antidote plus efficace mais tu serais probablement morte avant même qu’il ne soit prêt. Je vais devoir manipuler tes organes depuis l’intérieur en pratiquant des incisions. Rassure-toi, j’essaierai d’immobiliser un maximum de nerfs mais je ne garantis pas que cela sera sans douloureux alors tente de ne pas trop bouger s’il te plait. »

Quant à l’écoulement sanguin, Yuri ferait en sorte d’essayer de ne toucher aucune artère. Si l’intervention se passait bien alors la jeune femme avait largement les compétences pour ne laisser aucune cicatrice sur le corps de sa désormais patiente. Il lui restait dès lors une dernière chose à lui demander.

« Il faudrait que rien ne puisse me gêner pendant mon intervention. Cela veut dire qu’il faut que je te retire tout ce que tu portes sur le haut du corps pour savoir précisément où j’incise. Une erreur pourrait mener à des complications que nous n’avons malheureusement pas le luxe de nous offrir. Et puis, il faut que je te désinfecte avant…tu sais, la sueur, tout ça… »

La jeune brune plongea son regard rougeâtre dans celui de sa camarade. Dans d’autres circonstances, Yuri aurait pu être gênée mais ici, il s’agissait de sauver la vie d’une personne et pour cela, elle prenait son travail très à cœur. A ce moment précis, le regard de la scientifique ne laissait transparaitre aucun indice qui laisserait penser qu’elle se jouait de Muku. Elle était sincèrement déterminée à remettre sur pied sa collègue du Kagakusha par tous les moyens.

En raison de l’étroitesse de la pièce, la jeune scientifique ne pouvait faire autrement que d’assister au spectacle que lui offrait la Senbaru. Ne se voulant pas trop insistante, Yuri rivait elle aussi de temps en temps les yeux sur la porte, se demandant si elle avait bien pris le soin de la fermer. De toute façon, Yagura n’oserait pas la déranger à nouveau donc elles devraient plutôt être tranquilles. Aussi loin qu’elle s’en souvenait, la jeune Miyazawa n’avait jamais vraiment pris le temps de se questionner sur ses préférences en matière de relation. Les rares fois où elle fut exposée à cette question, elle avait toujours répondu presque arbitrairement qu’elle préférait la compagnie des femmes mais sans réellement réfléchir sur la question.

Cependant, la vue du corps de sa collègue ne suscita aucune réelle réaction de sa part. En effet, la jeune brune avait une conception bien platonique de l’amour. Elle n’était jamais vraiment arrivée à désirer sans aimer sincèrement et pour elle, un amour sans sentiments était d’une fadeur digne des plus mauvais plats qui lui aient été donnés de goûter. Néanmoins, elle devait tout de même accorder que Muku possédait un corps sublime qui en ferait chavirer le cœur de nombreuses personnes et son tatouage, dorénavant totalement exposé, ne faisait qu’ajouter de la beauté à ce magnifique tableau. Malgré cette analyse, les yeux de la Miyazawa ne trahissait aucune pensée libidineuse et restait parfaitement dans son rôle de médecin. La situation n’était pas propice aux compliments ni aux boutades sur le corps de sa patiente, qui même si elle n’avait rien à envier au sien, requérait des soins urgents.

Une fois Muku installée, la jeune femme posa délicatement une main sur sa poitrine puis une autre sur son poignet. Le but était de comparer les fréquences cardiaques aux deux endroits afin d’avoir une idée de l’état de son cœur. Même si celui n’était pas atteint à proprement parler, il avait du pomper sans relâche pour tenter d’évacuer le poison par tous les moyens. Un rythme légèrement plus faible que la normale, laissant suggérer que celui-ci trahissait une certaine fatigue qui se répercutait sur tout le corps de la Senbaru. Elle devrait tenir bon mais la Miyazawa devait faire preuve de beaucoup de méthode.

Passant une main dans son dos et appuyant sur son ventre de l’autre, Yuri incita sa compagne à se relever puis à l’aide d’un chiffon, elle s’affaira à lui nettoyer toute la partie supérieure de son corps. Elle ignorait combien de temps la Senbaru était restée à macérer dans sa sueur mais cette dernière contenait des bactéries qui pouvaient induire une infection que Yuri pouvait aisément éviter au prix de quelques moments gênants pour sa collègue. Méthodiquement, la jeune brune frotta soigneusement toutes les parties du haut de son corps et bientôt un parfum d’éthanol éthéré bien plus agréable remplaça les effluves de sueur. Satisfaite par la propreté de sa patiente, Yuri la rallongea à nouveau en lui plaçant les bras le long du corps.

« Je ferais ce que je peux pour que tu sois opérationnelle pour demain. »

D’un air déterminé, elle activa son scalpel de chakra et l’approcha du flanc droit de sa patiente. Yuri savait parfaitement où était disposé chaque organe et ses incisions ne semblaient pas être précédées d’hésitation. Son foie avait certainement été le plus touché alors elle entailla chacun des huit segments qu’il comportait afin de libérer le poison distillé. Puis, rapidement, elle changea de technique afin de recouvrir ses mains de chakra et de les plonger directement dans le corps de la Senbaru. Cela pouvait paraître impressionnant de voir quelqu’un farfouiller dans son corps de la sorte mais cela était un mal nécessaire. La Miyazawa se fraya donc un chemin jusqu’à l’organe qu’elle manipula délicatement. En l’occurrence, chacun des huit segments était facilement atteignable sauf le premier qui était légèrement enfoui parmi les autres. Une finesse extrême devait être requise afin de ne pas sectionner l’artère principale du foie. Puis, grâce à une force de capillarité, les particules empoisonnées vinrent se fixer aux effluves. Refaisant le chemin inverse, la jeune brune put extraire ses mains du corps une première fois.

En raison de la riche vascularisation du foie, ses mains étaient ensanglantées mais aucune blessure n’était présente à la surface. Le corps de la Senbaru était immaculé au début de l’opération et elle mettait un point d’honneur à le restaurer tel que Muku le lui avait confié. Les effluves de chakra verdâtres au début de l’extraction s’étaient teints d’un ton violacé menaçant. Relâchant sa technique dans la bassine, l’eau se colora immédiatement dans des teintes sombres tandis que le poison dansait sournoisement dans cette dernière.

« Je vais réitérer l’opération dans les principaux organes. » Annonça-t-elle brièvement.

Tout au long de l’opération, la Miyazawa était attentive aux réactions de Muku. Elle savait que sa collègue était empreinte d’une certaine fierté inhérente à son clan mais Yuri savait reconnaître la douleur sur le visage alors, de temps à autre, elle lui laissait un peu de répit avant de continuer. Durant de longues minutes qui devinrent rapidement des heures, la jeune femme réitéra l’opération sur chacun de ses organes. Dernier bastion du poison, ses poumons demeuraient alors la partie la plus délicate. Les alvéoles qu’ils contenaient étaient fragiles mais surtout, la Miyazawa devait s’accorder sur la respiration de la Senbaru pour ne pas l’étouffer. Elle commença par le droit, plus praticable et plus volumineux en raison de l’absence de cavité abritant l’organe le plus vital du corps humain. Là, Yuri glissa ses doigts sur l’une des collines de la jeune femme avant que sa main n’y plonge. Parcourant les masses graisseuses sous-jacentes, elle s’arrêta lorsqu’elle rencontra un muscle plus lisse. Pressant davantage sur sa technique afin d’atteindre les alvéoles, la Miyazawa commençait à ressentir la fatigue.

« Allez…c’est presque fini…le plus compliqué maintenant… »

A nouveau, ses mains sortirent du corps de la Senbaru et Yuri jeta le tout dans la bassine. Un mélange d’eau, de sang et de poison emplissait désormais la bassine jusqu’à ras bord mais déjà, la Miyazawa avait posé sa main sur la colline gauche de sa patiente avant d’explorer à nouveau sa cage thoracique. Cette fois-ci elle ressentait clairement les battements de cœur de la Senbaru. Redoublant de finesse, la jeune scientifique parcourait doucement, millimètre par millimètre l’organe ciblé. Il ne fallait surtout pas qu’elle touche son cœur sous risque de lui faire rater des battements qui la ferait sursauter. Cette dernière étape prit de longues minutes où Muku pouvait voir l’intense concentration à laquelle la Miyazawa était livrée. Elle effleurait à peine l’organe respiratoire, juste assez pour que les particules empoisonnées viennent s’emprisonner.

Continuant à gauche, la jeune Miyazawa rencontrait la cavité péricardique qui abritait le cœur. C’était presque étonnant de voir à quel point la scientifique avait la vie de la Senbaru entre ses mains. Que serait-il passé si elle avait été animé de mauvaises intentions ? Elle n’avait qu’à empoigner l’organe musculaire pour mettre un terme à la vie de la jeune femme. Le corps humain pouvait parfois être très fragile et le fait que la vie ne tienne qu’à un fil prenait tout son sens à cet instant. D’une certaine manière, et même si Muku ne l’avouerait sans doute jamais, elle faisait confiance à Yuri. Sinon, pourquoi aurait-elle expressément demander son aide ? Si elle lui était vraiment hostile alors la Senbaru ne l’aurait jamais laissé manipuler son corps de la sorte.

Finalement, après des heures d’intervention, la Miyazawa avait réussi à extraire l’intégralité du poison qui rongeait le corps de sa collègue. Il restait maintenant à réparer tous les dommages causés par celui-ci et de refermer toutes les incisions que Yuri avait créées pour le bon déroulement de l’intervention. Une tâche tout aussi rude qui lui demanda encore des ressources qui étaient déjà bien amoindries. Désormais, il n’y avait plus de place pour le doute et Muku pouvait voir sur le visage éreinté de la scientifique que cette dernière avait tout donné pour rétablir sa santé. Les draps étaient maculés de sang et pourtant la Senbaru était exempte de toute blessure. Son corps lui avait été restitué dans l’exact état dans lequel elle l’avait confié à Yuri. S’affaissant à demi sur le bord du lit, la tête sur ses bras, Yuri sentait déjà ses forces la quitter. Sans doute que, vers la fin, c’était l’adrénaline qui lui évitait de vaciller. Maintenant que la tension était passée, la fatigue reprenait ses droits.

« Tu es tirée d’affaire désormais. Ton inaction t’a fait perdre du tonus musculaire alors, demain, efforce-toi de t’exercer un peu avant de quitter la chambre. Je te conseille de ne pas te rhabiller tout de suite et de dormir de la sorte. Ta fièvre n’est pas encore totalement tombée mais lorsque ton corps se rendra compte que tu es tirée d’affaire alors tes signes vitaux reviendront à la normale. »

La Miyazawa peinait à garder les yeux ouverts et elle n’avait clairement plus de force pour sortir de la chambre. Yagura dormait depuis longtemps déjà, ce qui laissait supposer que les deux femmes devraient probablement se partager le lit pour le reste de la nuit. Pourtant, se hisser sur ce dernier paraissait être une épreuve insurmontable. Vidée mais une expression joyeuse sur le visage, la jeune femme lui adressa une dernière parole.

« Au fait, je n’ai pas eu l’occasion de te le dire la dernière fois mais je trouve ton tatouage vraiment magnifique. »

Des paroles empreintes d’une sincérité extrême qui, sitôt qu’elles furent prononcer, plongèrent la Miyazawa dans un profond sommeil. Un sourire de satisfaction se dessinait sur son visage que l’on pouvait interpréter comme une sincère satisfaction d’avoir sauvé une vie. En quête d’un repos bien mérité, c’était maintenant au tour de la Senbaru de veiller sur sa collègue afin qu’il ne lui arrive rien jusqu’à son rétablissement.

Spoiler:

Yuri se réveilla longtemps après son intervention. Son repos avait été réparateur mais elle n’avait pas encore recouvré toutes ses facultés. L’énorme dépense de chakra couplé au fait qu’elle ne s’était pas reposée depuis son départ de Kumo lui laissait envisager qu’elle devait y aller doucement sur cette journée. Heureusement pour elle, Muku l’avait alitée avant d’entamer ses investigations. La jeune femme avait raison. Il y avait quand même une part de sympathie en elle, voire peut-être une forme de reconnaissance. Elle espérait que sa collègue puisse lui rapporter des faits car dans l’état actuel des choses, Yuri n’était pas disposée pour mener des réflexions complexes. A défaut d’être opérationnelle, la jeune femme s’occupa de ranger la chambre et d’ouvrir les fenêtres afin d’en chasser les odeurs désagréables. Elle refit le lit, disposa de nouveaux draps et jeta les anciens de sorte à ce que toute trace de leur alitement fut effacée. Lorsqu’elle eut fini, la jeune femme sortit à la rencontre de l’agriculteur qui s’enquerra immédiatement de sa situation.

« Seigneur, je me demandais combien de temps tu allais dormir. »

« J’ai dormi tant que ça ? »

« Cela fait plus d’une journée que tu étais au lit. La jeune femme qui t’a bordée est partie tôt ce matin. Elle avait l’air d’aller mieux donc je suppose que tu as fait le nécessaire. J’ai toujours su que tu étais capable de grandes choses. »

« Merci mais je n’ai fait que ce qui devait être fait. Enfin, ce n’était pas sans conséquence et je t’avoue que je sens que mon esprit est embrumé donc je ne vais pas pouvoir me forcer aujourd’hui. Je vais aller examiner les champs. Ah et j’aurais aussi besoin d’un autocuiseur, un tuyau en métal et un petit seau aussi. »

Yuri laissa l’agriculteur sur ces bonnes paroles avant de s’aventurer dans les champs. Mais elle fut arrêtée par Yagura une nouvelle fois.

« J’ai oublié de te dire mais il y a des gens qui sont passés ce matin. Rassure-toi, rien à voir avec les types d’hier. Ils portaient des uniformes et ils versaient un truc dans la rivière. Le temps que je comprenne ce qu’il se passait et ils étaient déjà rentrés ! »

Yuri lui sourit et posa une main sur son épaule pour le rassurer.

« Ne t’inquiète pas, c’est moi qui les ai demandés, ils sont dans notre camp. »

La jeune femme n’en rajouta pas plus et se dirigea vers les champs. La périphérie du champ, celle au contact du point d’eau présentait des épis complètement détruits. Aucun doute, le poison les avait foudroyés sans pitié.

« Destruction cellulaire…un phénomène semblable à la nécrose. C’est ce qui serait arrivé à Muku si je n’étais pas intervenue… »

La jeune femme continua sa ronde et tomba sur d’autres plants. Elle en ramassa un et constata quelque chose à sa surface. L’espace interstitiel entre les épis étaient recouvert d’un très fin filament blanc que l’on confondrait presque avec une toile d’araignée mais il n’en était rien. En réalité, il s’agissait de filaments mycéliens qui se formaient lors d’une infection fongique. La cause de ce flétrissement était donc quelque chose que la Miyazawa connaissait bien pour en avoir fait toute une analyse dans les galeries souterraines du village. Quant aux plants centraux, ces derniers avaient été privés de leurs substances vitales, à la manière d’un parasite. Il lui fallait un peu plus de temps pour en découvrir les causes mais c’était déjà un bon début.

Retournant dans la maison, elle trouva le nécessaire qu’elle avait demandé à Yagura. A partir de là, c’était un jeu d’enfant pour la Miyazawa que de réaliser son montage. Elle versa le contenu de la bassine qui lui avait servi pour récolter le poison et en versa le contenu dans l’autocuiseur. Puis elle fit passer le tuyau par-dessus en se servant du trou dans le couvercle avant de fixer le tout solidement. Une partie du tuyau reposait dans une bassine d’eau et servait comme réfrigérant qui servirait à condenser les vapeurs tandis que son extrémité reposait dans le seau pour la récolte. Autrement dit, la jeune scientifique se livrait à une distillation qui lui permettrait de récupérer le poison pur. Accroupie devant son montage, elle attendit tranquillement le retour de Muku afin de lui raconter ce qu’elle avait découvert dans le champ. Elle avait une idée de comment débusquer les criminels mais Yuri voulait revoir ce que Muku avait découvert dans ses investigations.

Après plusieurs heures, Yuri obtint le résultat qu’elle attendait. Méthodiquement, elle rangea les poisons dans des petites fioles. C’était toujours utile pour les recherches du Kenkyûsha et l’élaboration d’un antipoison efficace. Ce dernier requerrait d’ailleurs la coopération de sa compagne de mission mais Yuri laissait cette proposition de côté pour l’instant. Elle avait déjà trifouillé suffisamment dans le corps de Muku et Yuri ne voulait pas trop se montrer invasive. Le retour de Muku s’accompagnait de quelques présents qu’elle offrit au fermier ainsi que des nouvelles inquiétant. La Senbaru lui fit part des informations qu’elle avait pu récolter et Yuri comprit alors d’où elle tenait la mule de bât ainsi que la charrette. Evidemment, elle ne put s’empêcher d’essayer de mettre Yuri dans l’embarras, ce qui mit à mal l’opinion de Yagura vis-à-vis de la scientifique.

« Bien sûr que non. Muku aime bien me taquiner. Je suppose que c’est pour toi également. Une sorte de compensation pour ton champ ? Enfin…ça ne remplacera pas ce qui a été détruit mais au moins c’est un début. »

Yuri ne fit pas l’effort de répondre à la boutade de Muku. Au fond, elle commençait un peu à s’y habituer et peut-être même à l’apprécier aussi. Dans les faits, Yuri était juste heureuse de la voir en bonne santé. Elle lui sourit chaleureusement. La joie de l’avoir sauvé l’animait toujours et cela se voit jusque dans les traits de son visage malgré un esprit encore un peu brumeux.
« Je suis contente que tu ailles bien Muku. » Conclut-elle ce petit intermède.

Quant aux nouvelles qu’apportait la diplomate, elles suscitaient moins de joie. Yuri avait l’impression que la situation de Murayouri se réitérait. A la différence que le plan était beaucoup moins élaboré et beaucoup plus cruel. Cette fois-ci, leurs ennemis n’hésitaient pas à utiliser des moyens directs pour arriver à leurs fins. Dans le creux de ses doigts, la jeune femme faisait rouler des tubes contenant une solution violacée. Il y avait là une petite idée mais c’était là des solutions que la Miyazawa n’aimait pas vraiment employer. Cependant, si elle les laissait faire alors il ne faudra pas longtemps avant que Houryou ne tombe dans la famine.

« Ecoutez, j’ai peut-être une idée. Je pense qu’on peut leur tendre un piège en utilisant les champs encore fertiles. Si ce sont toujours les mêmes personnes qui frappent alors nous pouvons peut-être mettre la main dessus. Cependant, je ne garantis pas leur survie alors pour les interrogatoires, j’ai bien peur qu’il faille oublier. »

Elle présenta l’un des tubes.

« C’est le fameux poison. Quasiment pur. Si j’utilise le même petit montage que tout à l’heure, on peut obtenir un gaz que l’on piègerait en utilisant l’autocuiseur comme réceptacle. On le dispose dans un champ et on attend. Sous pression, le poison restera longtemps sous sa forme gazeuse mais il ne faudra pas trop trainer et être sûr que les malfrats se pointent sinon, le plan tombe à l’eau. »

Yuri se tourna vers Muku, l’air sérieux.

« J’aurais besoin de tes talents claniques si tu le veux bien. Le but est d’attirer les malfaiteurs dans le champ où l’on aura disposé préalablement la cocotte. Ensuite, tu la perceras avec l’une de tes techniques. Un petit trou suffit. Les gaz ont tendance à occuper tout l’espace disponible donc la différence de pression entre l’extérieur et l’intérieur va créer un appel d’air suffisamment puissant pour faire sauter le couvercle et disperser le nuage de poison. Bien sûr, cela a un coût et tout ce qui se trouve dans un rayon de dix mètres sera totalement anéanti. »

C’était un plan basique, simple. Malheureusement, dans l’urgence, c’est tout ce que l’esprit de la scientifique pouvait élaborer. Elle était encore trop dans le brouillard pour être en possession de toutes ses capacités de réflexion. Mieux, si il était possible de repousser l’opération à demain alors peut-être même qu’elle aurait de meilleurs résultats.

« Si on attend demain, je ne t’en serais que plus reconnaissante. Eventuellement, je pourrais peut-être en sauver un pour qu’on puisse lui soutirer des informations. Ou en tout cas, suffisamment pour qu’il soit en mesure de parler mais pas assez pour qu’il représente une menace. »

Les mains sur les tempes comme pour soulager sa fatigue, Yuri regarda Muku d’un air plus ou moins satisfait. Comme toujours, elle était prête à entendre les suggestions de la Senbaru. Son aide était plus que la bienvenue dans ces moments difficiles.

« Alors ? Qu’en dis-tu ? »

Le plan de Yuri fut approuvé. Faute de mieux, c’est tout ce qu’elle avait de disponible pour l’instant. Yagura voulut émettre une réserve quant au fait de vouloir reporter l’opération au lendemain mais Yuri était beaucoup trop fatiguée pour essayer d’argumenter. Déjà que fixer un point trop longtemps lui donnait mal au crâne alors ce n’était même pas la peine d’essayer de tergiverser. A sa grande surprise, Muku la défendit en invoquant le Mihari et transforma le plan de Yuri en le faisant passer pour une opération mûrement réfléchie pour duper l’ennemie.

« Si vous le dites comme ça alors je pense que cette vieille branche de Chikyuu pourrait comprendre. Je m’occuperais de lui dépêcher le message avant l’arrivée de l’ennemi de sorte à ce qu’ils aient bien le champ libre pour leurs actions. »

Sur ce coup, Yuri était reconnaissante envers Muku. C’était bien d’avoir une alliée sur qui compter de temps à autre sans devoir faire tout le travail en permanence. Si elle pouvait éliminer les tensions entre elles à l’avenir, leur tandem fonctionnerait peut-être encore mieux. Durant la conversation, Muku la questionna sur l’état des champs que la jeune Miyazawa avait visité plus tôt.

« Il n’y a pas grand-chose à dire à vrai dire. Les plants extérieurs ont été empoisonnées par la même substance que j’ai retrouvée dans ton corps Muku. Une destruction totale des cellules. Le sol est empoisonné et il est difficile de réeffectuer de l’agriculture avant longtemps. En continuant, j’ai remarqué que des filaments étaient accrochés à certains plants. C’est une infection fongique causée par un champignon microscopique. Il vit au dépend des plantes et les tue rapidement pour croitre. Cependant, tout a été fait en une nuit donc je suppose que la personne ayant orchestré cela a poussé ce phénomène à l’extrême. Heureusement, ils sont très sélectifs donc je ne pense pas que ce soit possible à utiliser contre des humains. C’est pour cela que j’ai demandé à un détachement de ninjas de venir détoxifier la rivière en y versant du sulfate de…enfin bref, un produit.»

Honjun était une ville agricole composée majoritairement de paysans sans réel moyen de se défendre. La Miyazawa supposa donc que ici, le Jinsei avaient envoyé des ninjas possédant des techniques de sabotage plutôt que des experts du combat. Cela dit, l’un d’entre eux semblait capable de manipuler un poison extrêmement puissant.

« Quant aux plants centraux, ils semblent avoir été vidés de leurs énergies directement par leurs racines. Donc je suppose que l’autre brute peut manipuler le Doton pour réaliser de telles choses. Quoiqu’il en soit, je pense qu’éviter l’affrontement direct serait à éviter… »

Elle termina sur ces conclusions tandis que le repas commençait à être servi. La démarche de Yuri semblait assez nonchalante, signe qu’elle ne feignait absolument pas la fatigue. Pendant le repas, elle peinait à garder les yeux ouverts et s’assoupit même une fois à table. Engloutissant rapidement son bol de soupe, Yuri émit son désir de vouloir se coucher tôt. Le vieil agriculteur ne roulait certainement pas sur l’or et c’est tout juste si il arrivait à libérer de la place pour les voyageurs itinérants. La jeune scientifique n’eut pas le cœur de lui demander de libérer une autre pièce pour son propre confort. D’autant plus qu’avec sa famille nombreuse, Yagura avait déjà fait preuve d’une bonté plus que suffisante envers les deux femmes.

Néanmoins, Yuri n’était pas cruelle. Par respect pour sa collègue et voulant éviter de la gêner davantage, elle demanda simplement à l’agriculteur de lui fournir un futon qu’elle dresserait simplement sur le sol. Elle avait beaucoup voyagé et même si elle était issue d’un milieu aisé, ce n’était pas la première fois qu’elle dormirait dans des conditions précaires, laissant le soin à Muku de prendre le lit qu’elle avait préalablement refait le matin. Une fois seules et la porte refermée, elle confia le reste des informations à Muku.

« Je pense que je pourrais être en mesure de détoxifier le sol quand on aura fini. Même avec notre petite opération de demain soir, il sera toujours possible de recultiver les terres après mais j’aurais besoin de ton aide. »

Yuri était un peu hésitante. Non pas qu’elle ne voulait pas exposer son idée mais elle était maintenant consciente que Muku nourrissait une certaine méfiance à son égard.

« Quand la mission sera terminée, j’aurais besoin que tu viennes me voir à l’Aiguille. Pendant que tu étais à l’agonie et en raison du temps que j’ai mis pour venir te soigner, ton foie à traiter des quantités énormes de poison. Avant que tu ne t’inquiètes, sache que ce n’est rien de grave. Pour être franche, j’aurais besoin de te prélever quelques cellules hépatiques. »

Sans laisser planer de doute, la jeune scientifique exposa immédiatement ses intentions en essayant d’être la plus transparente possible.

« Pour faire simple, ton exposition au poison t’a fait métaboliser des protéines qui sont dirigées contre la toxine. Des expositions ultérieures auront dorénavant beaucoup moins de chance de te terrasser parce que tu y as survécu. J’aurais donc besoin d’un peu du sang contenu dans ton foie pour élaborer un antipoison efficace. Il servira notamment à dépolluer le sol mais surtout de le distribuer à la population. En effet, ce que j’ai versé dans la rivière n’est qu’une solution temporaire pour minimiser un maximum les effets du poison mais il n’en reste pas moins que les gens continueront à exploiter le point d’eau, y compris Yagura. Evidemment, tu n’es pas obligée d’accepter et je comprendrais que l’expérience d’hier soir ne t’a pas laissée de marbre. Ne t’inquiète pas, si tu refuses, je trouverais un autre moyen d’y arriver. »

Sur cette dernière affirmation, Yuri n’en était elle-même pas très sûre de trouver une alternative. Cependant, elle ne voulait pas que Muku puisse se culpabiliser plus tard en cas de refus. Elle trouverait bien une idée non ? Enfin, c’est ce qu’elle espérait en tout cas…Quoi qu’il en soit, Yuri fixait Muku. Souriante malgré la fatigue, elle laissa sa camarade libre de sa décision. Peu importe son choix, la jeune femme ne lui en voudrait pas.

« En tout cas, merci pour m’avoir couvert tout à l’heure, dans mon état, je n’aurais pas su comment répondre. » Avoua-t-elle sincèrement.

La réponse à la requête de Yuri fut mitigée. Elle ignorait si sa camarade allait l’accepter et comme pour se donner davantage de délai de réflexion, Muku avait habilement détourné le sujet. Par sympathie, la jeune scientifique ne força pas sur la question davantage et laissa la Senbaru plonger dans un profond sommeil tandis qu’elle-même luttait encore un peu pour s’endormir. Pour cause, la dernière nuit l’avait bien dérangée en terme de confort puisque Muku l’avait simplement tiré pour la coucher, laissant la pauvre brune dormir dans son accoutrement. Lorsqu’elle s’assura que la jeune femme dormait profondément, Yuri se débarrassa de tout ce qui la gênerait dans son sommeil, laissant ses avant-cœurs se libérer de leur douloureuse entrave de la veille. Cependant, la jeune brune s’était intelligemment débrouillée pour se lever plus tôt que d’habitude pour se recouvrir avant que Muku ne la réveille une heure plus tard.

Cette fois-ci, Yuri était débordante d’énergie et elle ne se fit pas prier pour se faire tirer du lit par sa compagne. Un petit-déjeuner plus tard et les deux femmes étaient déjà rendues dans les champs voisins pour commencer leur inspection. Muku avait vu juste et ces derniers avaient été dévastés selon le même schéma que ceux que Yagura cultivaient. C’est dire si leurs ennemis étaient confiants en leurs capacités au point de reproduire le même pattern plusieurs fois. Son verdict n’était pas difficile à établir mais il y avait tout de même une légère différence sur ces terrains de désolation.

« Regarde, les plants longeant la rivière…ils n’ont pas été affectés par le poison. On dirait que mon petit subterfuge a fonctionné et ils ont du avoir plus de travail qu’ils ne le pensaient. »

En effet, sur les champs de Chikyuu, la méthodologie manquait un peu de précision et c’est un travail légèrement bâclé qui avait été présenté aux yeux de la scientifique du Kagakusha. Pour un novice, le résultat était le même mais pour Yuri, cela démontrait une certaine fébrilité dans l’esprit de leurs ennemis qui avaient bien du être étonnés de trouver des plants debout alors qu’ils étaient censés être morts depuis un bout de temps.

« Il est possible que la raison pour laquelle ils aient recours au poison est peut-être parce qu’ils n’ont pas le temps de tout dévaster avec leurs techniques. Du coup, ils ont recours à d’autres moyens pour diminuer leur charge de travail. Que ce soit les champs de Yagura ou ceux de Chikyuu, il faut avouer qu’ils recouvrent pas mal de terrain d’où le recours au poison. »

Un schéma se dessinait dans l’esprit de Yuri. Malgré sa fatigue d’hier, le plan qu’elle avait élaboré pouvait constituer un bon moyen de les coincer cependant, leurs adversaires étaient des shinobis contrairement à la dernière fois et il n’était pas exclu qu’un combat puisse éclater. Tandis qu’elle réfléchissait, Yuri accompagna Muku jusque chez Chikyuu qui visiblement n’était pas très heureux de revoir la Senbaru.

« Non content de m’avoir piqué mon vin et voilà que tu te ramènes avec ta copine ? Vous ne voyez pas que j’ai presque tout perdu ! Qu’est-ce que vous me voulez ? »

Yuri tenta tant bien que mal de calmer la situation. En fait, elle redoutait surtout que la Senbaru n’envenime le débat en surenchérant sur la réplique du vigneron. Elle lui expliqua donc la situation en lui promettant de restaurer ses terres une fois la menace écarter puis s’occupa d’exposer son plan. Certaines parcelles avaient été épargnées et, pris de court, les criminels reviendraient sûrement achevé leur travail dans la nuit. A court de chakra et peut-être de poison également, ils s’étaient retirés pour récupérer avant de refrapper le lendemain.

« Nous nous cacherons dans votre grange et placerons un dispositif concocté par mes soins au milieu des plants encore debout. Je suis très curieuse de savoir si ils peuvent résister à leur propre poison. »

Yuri se tourna ensuite vers Muku pour lui donner ses instructions.

« La grange est construite sur deux étages. En grimpant à l’étage supérieur, tu devrais avoir une vue imprenable pour tirer ton projectile qui fera sauter le conteneur empoisonné. Je me chargerai ensuite de les neutraliser en leur coupant toute tentative de fuite en leur tranchant les tendons. Cependant, mon plan n’est pas infaillible et il est possible qu’un combat puisse éclater. Contrairement à Murayouri, on affronte de vrais shinobis cette fois et ce n’est pas sûr qu’ils se fassent duper aussi facilement par leur propre piège. Nous ignorons si nos ennemis ont pris des contremesures pour ce genre de situation mais j’aurais besoin que tu engages l’empoisonneur si nous étions amenés à nous battre. »

La jeune scientifique clarifia immédiatement son propos avant que Muku n’y aille de sa méfiance.

« Vu que tu as déjà été exposée à son poison récemment, tu en es immunisée pour l’instant. Outre ma fatigue, j’ai laissé volontairement écoulé une journée afin que ton foie puisse métaboliser suffisamment d’enzymes pour dégrader le poison. Si tu l’affrontes, son poison ne lui sera d’aucune utilité contre toi. En jouant sur des variables que nos adversaires ignorent, nous pourrons en venir à bout sans trop de dommages. Du moins, c’est ce que j’espère.»

Rien n’était laissé au hasard et chaque coup depuis son arrivée avait été minutieusement calculé. Par sincérité, Yuri exposa ses pensées jusqu’au bout afin de ne laisser planer aucun doute.

« Je n’aurais eu aucun mal à me porter volontaire mais j’ai peur que si je m’expose au poison, personne ne puisse venir nous aider cette fois-ci. Et si je meurs, beaucoup de personnes succomberont avec moi avant que le Kagakusha ne puisse intervenir et tu as vu comme moi à quel point il était difficile d’extraire un poison aussi puissant. Je te demanderais donc de me faire encore confiance sur ce coup-ci s’il te plait. »

Yuri affichait un sourire compatissant. Cependant, ses yeux ne trahissaient aucune malice ni une quelconque couardise à ne pas vouloir s’exposer au danger. Si Muku se blessait ou s’empoisonnait à nouveau, elle seule pourrait la sortir d’une situation délicate. Elle lui avait déjà prouvée à maintes reprises que la Senbaru n’avait rien à craindre alors Yuri avait espoir de pouvoir encore recourir à la confiance de sa camarade.

Son plan semblait avoir fait l’unanimité. Cependant, malgré l’approbation de sa partenaire, Yuri ressentait toujours un certain froid entre elles. A chaque fois que la jeune brune essayait de s’en approcher, elle avait l’impression de se heurter à un mur infranchissable comme si la Senbaru s’efforçait toujours de garder ses défenses érigées envers la Miyazawa. Aussi loin qu’elle s’en souvenait, Yuri n’avait jamais vraiment eu d’amis. Le travail de ses parents ne lui avait jamais permis de lui en donner l’occasion du au fait qu’ils bougeaient énormément. De plus, Yuri ne s’était intéressée que très peu à ses camarades dont les sujets d’intérêts divergeaient  beaucoup trop des siens, ce qui l’avait menée à une certaine solitude bien que totalement assumée. Sa sédentarisation à Kumo avait un peu changer les choses et Yuri essayait, dans le peu de personnes qui retenaient son attention, de tisser quelques liens. Cependant, il s’avérait que cette tâche était particulièrement fastidieuse lorsqu’on ne savait pas s’y prendre.

« Au moins, tu es d’accord, c’est déjà ça… » Murmura-t-elle.

Le reste de la journée se passa relativement calmement jusqu’à la tombée de la nuit où chacun rejoignit son poste. Les agriculteurs avaient eu pour instructions de ne rien changer à leurs habitudes et de faire comme si de rien était. Yuri aurait bien voulu prévenir tout le voisinage mais Muku avait raison. Comme à Murayouri, ils avaient compris qu’une partie de la population adhéraient aux idéaux du Jinsei et que cela était probablement le cas de certains d’entre eux. Quoi qu’il en soit, Yuri se cacha au sein des parcelles qui avaient survécu grâce à son petit stratagème ingénieux. Situées près de la rivière, son ruissellement couvrirait le bruit les mouvements de la jeune kumojin aux travers des plants.

Yuri avait astucieusement placé son piège à l’extrémité des parcelles encore debout, de manière à ce que la lumière de la lune puisse refléter l’éclat du métal du conteneur. Tels des animaux, les criminels ne tardèrent pas à être attiré par ce scintillement artificiel mais alors que Yuri plissait les yeux pour apercevoir les silhouettes, elle ne s’aperçut que trop tard qu’il n’y en avait qu’une. Alors qu’elle réfléchissait activement à une solution pour avertir sa partenaire perchée dans la grange, Yuri aperçut des silhouettes volatiles s’échapper de cette dernière et venir violemment percuté leur objectif. Son piège explosa sous l’impact libérant une quantité non négligeable de gaz dans le rayon prédit par la jeune scientifique qui dut quitter sa cachette pour être sûre de ne pas s’exposer à ce violent poison. Les nappes de brumes mortelles ne lui permirent pas de juger de la réussite de son plan bien que quelques râles lui donnèrent une idée de l’agonie que devait vivre la victime.
En alerte, la jeune brune chercha activement leur deuxième cible. Un sifflement dans l’air lui donna tout juste le temps d’éviter un lancer de kunai dirigé vers sa poitrine. Celui-ci l’égratigna au niveau de son épaule droite avant de finir sa course dans les fourrées derrière elle.

« Jolis réflexes. Je voulais viser le cœur pour en finir rapidement mais je suppose que c’est plus amusant comme ça. Tant pis, cela ne changera rien à la finalité des choses. »

Il avait raison. L’égratignure sur l’épaule de Yuri était sans doute l’un de ses derniers soucis. Pire encore, c’était ce qui se trouvait sur le kunai qui était inquiétant. Elle s’en doutait, son adversaire manipulait le poison et assurément que toutes ses armes en étaient imprégnées. Fort heureusement, il n’avait pas eu recours à un nuage de poison, auquel cas, il lui aurait été fatal.

« Il n’a pas l’air de vouloir recourir à cette technique…redoute-t-il d’être à court de chakra après cela ? »

Ne lui laissant pas plus de temps de réflexion, Yuri envoya un kunai mais celui-ci passa au-dessus de sa tête et alla se ficher au pied d’un parterre situé juste derrière eux. La plaie sur son bras fonçait à mesure que le poison s’étendait sur cette dernière.

« Alors ? On arrive plus à viser ? Je me disais bien que ces abrutis d’agriculteurs ne pouvaient pas élaborer de plan aussi ingénieux pour contrer mon poison. Ne t’inquiète pas, le poison que je t’ai inoculé n’affectera que les muscles striés. Tout ce qui est à l’intérieur restera intact. Après tout, quand j’en aurai fini avec toi, je me ferais un plaisir d’explorer les moindres recoins de ton cerveau après l’avoir extrait ! »

Un sentiment de dégoût envahit la Miyazawa. Malgré son amour pour la science, il était hors de question que son corps finisse en sujet d’expérience. Un petit crépitement se fit entendre dans les champs derrière tandis qu’une fumée blanchâtre s’élevait de ce dernier. Yuri avait compris depuis bien longtemps pourquoi la Senbaru avait tiré aussi vite. Dans la nuit presque totale, il était difficile de distinguer les silhouettes mais bientôt, la jeune Miyazawa allait lui offrir l’opportunité d’agir à nouveau.

« Tu m’en vois navrée mais je vais devoir refuser. Je n’ai aucune envie d’être un sujet de tes déviances perverses. Tu te sens si intelligent et pourtant tu es si idiot. Lorsqu’il s’agit de combattre, je ne suis loin d’être une virtuose mais j’ai toujours un tour dans mon sac ! »

Une explosion de lumière illumina le parterre et Yuri en profita pour s’extirper en accélérant drastiquement ses mouvements. En effet, dans la nuit noire, son adversaire n’avait même pas remarqué que le kunai était lesté par une petite boule contenant une substance dont l’explosion produisait une vive lumière. Exposé ainsi, Muku ne devrait avoir aucun mal à viser son adversaire maintenant qu’elle le voyait clairement dans ce court laps de temps. Si sa diversion suffisait alors la Miyazawa regagnerait rapidement la grange pour extraire le poison et soigner sa blessure.

HRP: